All for Us avec Gabrol
Il faisait frais, à Yggdrasil. Le vent soufflait, il décoiffait les crinières, rafraîchissait les corps. C’était le cœur alourdit qu’il marchait, se débarrassant des derniers grains de sable logés dans ses cheveux qui s’envolaient. Le regard assombri, le visage creusé, il était difficile de le reconnaître. Pour dire l’entière vérité, il ne se reconnaissait lui-même plus. Il avait la sensation, face à la glace, que ce n’était plus lui. Que Gabryel de Venomania n’était qu’un vague souvenir, un mythe qu’il s’était raconté toutes ses années. Pourtant, il en souffrait. Le miroir lui renvoyait le reflet d’un étranger. La couleur même de ses pupilles semblait être différente, plus terne. Ce violet pétillant était dorénavant fade, plein de frustration. Il avait passé un mois durant à Caldis, parcourant les dunes et les marchés de sa jeunesse, sans pour autant y retrouver un quelconque réconfort. L’aridité de ses terres n’avaient eu de cesse de le briser. Il aimerait oublier, se forger de nouveaux souvenirs, laisser tout cela loin derrière lui. Il aimerait pouvoir fermer les yeux, sans être hanté par le corps inerte de son père et le cercueil de son grand-père. Mais ses vœux ne s’exauçaient pas et ses prières n’étaient pas entendues. Il était donc contraint de faire avec, sans pour autant pouvoir l’accepter.
Le Grand Mur lui parût intimidant, lorsqu’il le traversa. Il avait attendu ce jour avec impatience et maintenant qu’il était ici il sentait son estomac se tordre d’angoisse. Il redoutait son retour dans la citée éossienne. Il avait tout laissé en plan, il était parti sans rien ranger, sans regarder en arrière, sans même prévenir ses proches. Une simple lettre avait été envoyée à Raol. On avait pu y lire de brefs informations, écrites rapidement et où l’on pouvait deviner qu’il avait forcé sur la plume, laissant quelques traces d’encre ci et là. Peut-être qu’iel n’y avait même pas prêté la moindre attention. Gabryel se souvenait encore parfaitement de leurs échanges, de son corps, du goût de ses lèvres... Mais après être parti ainsi, voudra-t-iel encore de lui ? Auparavant, il ne se serait jamais posé une telle question, mais tout était tellement flou depuis... eux. Il ne doutait nullement de ce qu’il ressentait, au contraire. Il savait qu’il ne comptait pas passer par chez lui, ni même par la caserne. Après avoir prévenu sa hiérarchie de son retour, il se mit en route des quartiers éossiens. Parce qu’il savait qu’il ne trouverait le repos qu’auprès d’ellui. Et qu’il avait besoin de lui dire toute la vérité. Il voulait lui parler.
Il avait trouvé un semblant de paix lorsqu’il put écrire à ses proches, sans se soucier de si les lettres seraient interceptées. C’était comme si plus rien de tout cela ne pouvait l’atteindre. Il n’avait eu aucun mal à se renseigner sur là où habitait la grenouille, s’en était terrifiant. Ses pas étaient lourds, il traînait des pieds. Pourtant, il était pressé. Mais il stressait plus qu’il ne voulait l’avouer. Il n’avait pas prévenu lea Zeteki de son retour, ni même qu’il comptait venir lae voir, était-ce une bonne idée ? Il ne le savait pas. Il souffla, laissant un léger nuage de fumée s’échapper de ses narines. Il se mordait l’intérieur des joues, prêt à faire demi-tour au moindre obstacle. Mais la route était dégagée, rien ne semblait vouloir l’arrêter, il lui fallait affronter ce moment. Après lui avoir écrit tant de mots, il devait dorénavant parler. Ce ne serait pas aussi aisé que de manier une plume, mais cela sera plus beau, plus sincère, plus véritable. Ce n’était pas facile pour lui de devoir s’assumer ainsi, mais il avait la sensation qu’il devait le faire, qu’iel méritait cela.
Dans son petit sac, Gabryel avait ramené quelques babioles. Deux bijoux, semblables au bracelet qu’iel lui avait offert, quelques plantes et mets de Caldis, une fiole dans laquelle il avait glissé des grains de sable, des pierres précieuses, un livre sur l'histoire de Caldissia et d’autres présents plus ou moins inutiles. C’était comme s’il venait se faire pardonner de son absence, alors qu’il savait que ce n’était pas grave, qu’iel comprendrait. Mais il savait que les explications resteront coincées dans sa gorge pendant un moment avant qu’il ne réussisse à formuler la vérité. Il ne l’avait jamais dit. Il n’avait jamais dit mot pour mot “Mon père et mon grand-père sont morts”. Comme s’il redoutait que s’il le disait alors cela signerait définitivement leurs morts. Comme s’il n’y aurait plus aucun retour en arrière possible. Néanmoins, il fallait qu’il le dise et il ne voulait pas que ça soit à qui que ce soit d’autre qu’à Raol. Alors, lorsqu’il se saisit de petites pierres pour les lancer contre sa fenêtre, il adopta un léger sourire attendri. Il voulait lea prendre dans ses bras et tout oublié, l’espace d’une seconde. Lorsqu’après plusieurs jets il put apercevoir la trogne de l’éossien.ne, il afficha un large rictus qui contrastait avec toute la fatigue que renvoyait son expression faciale, et il s’exclama :
Il leva en l'air son petit sac comme preuve. Ses yeux plissés paraissaient espiègles, mais ils étaient en réalité un peu peinés. Il avait bien un endroit où passer la nuit, il n’en avait tout simplement pas l’envie, il n’était pas tout à fait prêt. Il voulait rester ici, auprès d’ellui, à dormir, se câliner, s’embrasser ou se balader, peu importait. Gabryel lea voulait à ses côtés, c’est tout. Ses bras se sont alors ouverts, comme pour l’accueillir et il sentait déjà les larmes le monter, alors qu’il n’avait encore rien dit.
Il n’en dit pas plus, se contentant de lea regarder le plus tendrement qu’il le pouvait. De sa bouche, cela pouvait sonner ironique, et pourtant il n'en était rien.
Il faisait frais, à Yggdrasil. Le vent soufflait, il décoiffait les crinières, rafraîchissait les corps. C’était le cœur alourdit qu’il marchait, se débarrassant des derniers grains de sable logés dans ses cheveux qui s’envolaient. Le regard assombri, le visage creusé, il était difficile de le reconnaître. Pour dire l’entière vérité, il ne se reconnaissait lui-même plus. Il avait la sensation, face à la glace, que ce n’était plus lui. Que Gabryel de Venomania n’était qu’un vague souvenir, un mythe qu’il s’était raconté toutes ses années. Pourtant, il en souffrait. Le miroir lui renvoyait le reflet d’un étranger. La couleur même de ses pupilles semblait être différente, plus terne. Ce violet pétillant était dorénavant fade, plein de frustration. Il avait passé un mois durant à Caldis, parcourant les dunes et les marchés de sa jeunesse, sans pour autant y retrouver un quelconque réconfort. L’aridité de ses terres n’avaient eu de cesse de le briser. Il aimerait oublier, se forger de nouveaux souvenirs, laisser tout cela loin derrière lui. Il aimerait pouvoir fermer les yeux, sans être hanté par le corps inerte de son père et le cercueil de son grand-père. Mais ses vœux ne s’exauçaient pas et ses prières n’étaient pas entendues. Il était donc contraint de faire avec, sans pour autant pouvoir l’accepter.
Le Grand Mur lui parût intimidant, lorsqu’il le traversa. Il avait attendu ce jour avec impatience et maintenant qu’il était ici il sentait son estomac se tordre d’angoisse. Il redoutait son retour dans la citée éossienne. Il avait tout laissé en plan, il était parti sans rien ranger, sans regarder en arrière, sans même prévenir ses proches. Une simple lettre avait été envoyée à Raol. On avait pu y lire de brefs informations, écrites rapidement et où l’on pouvait deviner qu’il avait forcé sur la plume, laissant quelques traces d’encre ci et là. Peut-être qu’iel n’y avait même pas prêté la moindre attention. Gabryel se souvenait encore parfaitement de leurs échanges, de son corps, du goût de ses lèvres... Mais après être parti ainsi, voudra-t-iel encore de lui ? Auparavant, il ne se serait jamais posé une telle question, mais tout était tellement flou depuis... eux. Il ne doutait nullement de ce qu’il ressentait, au contraire. Il savait qu’il ne comptait pas passer par chez lui, ni même par la caserne. Après avoir prévenu sa hiérarchie de son retour, il se mit en route des quartiers éossiens. Parce qu’il savait qu’il ne trouverait le repos qu’auprès d’ellui. Et qu’il avait besoin de lui dire toute la vérité. Il voulait lui parler.
Il avait trouvé un semblant de paix lorsqu’il put écrire à ses proches, sans se soucier de si les lettres seraient interceptées. C’était comme si plus rien de tout cela ne pouvait l’atteindre. Il n’avait eu aucun mal à se renseigner sur là où habitait la grenouille, s’en était terrifiant. Ses pas étaient lourds, il traînait des pieds. Pourtant, il était pressé. Mais il stressait plus qu’il ne voulait l’avouer. Il n’avait pas prévenu lea Zeteki de son retour, ni même qu’il comptait venir lae voir, était-ce une bonne idée ? Il ne le savait pas. Il souffla, laissant un léger nuage de fumée s’échapper de ses narines. Il se mordait l’intérieur des joues, prêt à faire demi-tour au moindre obstacle. Mais la route était dégagée, rien ne semblait vouloir l’arrêter, il lui fallait affronter ce moment. Après lui avoir écrit tant de mots, il devait dorénavant parler. Ce ne serait pas aussi aisé que de manier une plume, mais cela sera plus beau, plus sincère, plus véritable. Ce n’était pas facile pour lui de devoir s’assumer ainsi, mais il avait la sensation qu’il devait le faire, qu’iel méritait cela.
Dans son petit sac, Gabryel avait ramené quelques babioles. Deux bijoux, semblables au bracelet qu’iel lui avait offert, quelques plantes et mets de Caldis, une fiole dans laquelle il avait glissé des grains de sable, des pierres précieuses, un livre sur l'histoire de Caldissia et d’autres présents plus ou moins inutiles. C’était comme s’il venait se faire pardonner de son absence, alors qu’il savait que ce n’était pas grave, qu’iel comprendrait. Mais il savait que les explications resteront coincées dans sa gorge pendant un moment avant qu’il ne réussisse à formuler la vérité. Il ne l’avait jamais dit. Il n’avait jamais dit mot pour mot “Mon père et mon grand-père sont morts”. Comme s’il redoutait que s’il le disait alors cela signerait définitivement leurs morts. Comme s’il n’y aurait plus aucun retour en arrière possible. Néanmoins, il fallait qu’il le dise et il ne voulait pas que ça soit à qui que ce soit d’autre qu’à Raol. Alors, lorsqu’il se saisit de petites pierres pour les lancer contre sa fenêtre, il adopta un léger sourire attendri. Il voulait lea prendre dans ses bras et tout oublié, l’espace d’une seconde. Lorsqu’après plusieurs jets il put apercevoir la trogne de l’éossien.ne, il afficha un large rictus qui contrastait avec toute la fatigue que renvoyait son expression faciale, et il s’exclama :
« Bonsoir, Raol. Aurais-tu une place, chez toi ? Il semblerait que je n’ai pas d’endroit où dormir, ce soir. J'ai de quoi payé. »
Il leva en l'air son petit sac comme preuve. Ses yeux plissés paraissaient espiègles, mais ils étaient en réalité un peu peinés. Il avait bien un endroit où passer la nuit, il n’en avait tout simplement pas l’envie, il n’était pas tout à fait prêt. Il voulait rester ici, auprès d’ellui, à dormir, se câliner, s’embrasser ou se balader, peu importait. Gabryel lea voulait à ses côtés, c’est tout. Ses bras se sont alors ouverts, comme pour l’accueillir et il sentait déjà les larmes le monter, alors qu’il n’avait encore rien dit.
« Tu m’as manqué Raol. Si tu savais... »
Il n’en dit pas plus, se contentant de lea regarder le plus tendrement qu’il le pouvait. De sa bouche, cela pouvait sonner ironique, et pourtant il n'en était rien.
kyro. 017 ldd