Clarence - Heaven is a place on Earth

TW : mort, deuil, violence, alcoolisme

Clarence.

Comme tous les golems, sa naissance est partie d’une pierre. Et d’un désir de création.

Ou plutôt de copie.

Chacun gère un deuil à sa manière. Pour le père de Clarence, ce fut l’alcool. Pour sa mère, semble-t-il, ce fut l’artisanat.

Lucien et Jade Montgomery mirent du temps à concevoir. Mais quand ce fut enfin le cas, ils chérirent leur fils unique, Clarence. Le garçon fut initié au travail de ses parents afin de pouvoir les aider et, plus tard, de leur succéder. L’enfant est turbulent et plein d’énergie mais fait la joie de ses géniteurs qui le voient comme un don d’Omnis. Leur entreprise d’imprimerie est en plus florissante. Alors la famille vit heureuse et prie pour que ça dure.
Il aurait fallu, toutefois, peut-être prier davantage.
Lorsqu’il a sept ans, Clarence tombe gravement malade. Des médecins sont appelés mais ils demeurent impuissants, et l’enfant finit par succomber au bout de quelques semaines.

Les Montgomery sont dévastés. Lucien tombe en dépression et se transforme, devient de plus en plus éteint. Jade doit le soutenir plus durement dans les affaires pour ne pas que l’entreprise coule mais elle est elle-même dévastée. Pendant des mois, le couple n’est plus le même, mais ils refusent de se séparer des affaires de leur enfant. C’est la femme du duo qui propose la première d’adopter un autre enfant, mais son mari refuse, et elle veut rester avec lui.
Puis, un jour, Jade apprend la magie qui entoure les automates et les golems. Modeler un enfant selon l’image que l’on souhaite. L’idée la séduit aussitôt. Elle pense que son mari serait heureux à nouveau si elle lui présentait un fils semblable à celui qu’ils ont perdu. Avec des économies mises de côté, Jade façonne donc un bébé golem avec une jolie pierre magique bleue comme l’azur pour créer un enfant qui sera la copie conforme de Clarence, jusqu’à même posséder le même prénom ; et puisqu’il sera fait de pierre, il sera plus résistant.

Lorsque Jade le présente à Lucien, la réaction de l’homme est loin comme elle l’avait imaginée. Croyant faire le bonheur de ce dernier, elle déchante lorsque la présence de l’enfant provoque d’abord le choc puis un rejet violent de sa part. Il le traite d’abomination et de d’autres mots terribles qui font écrouler le monde de Jade. Lucien ne veut pas voir le petit garçon, mais elle va quand même le garder et l’élever comme ce fils qu’elle a perdu, frôlant régulièrement la frontière entre ce souvenir qu’elle en avait et la réalité qui la frappe lorsqu’elle se souvient qu’ils sont deux fils différents. Son père l’ignore donc, mais sa mère lui offre le même amour qu’au premier jour de sa création.

Même si c’est un golem, Clarence intègre l’école dès qu’il en a l’âge pour suivre une éducation normale, tout en se mettant à lire durant son temps libre des histoires pour se divertir. Le nez plongé dans les bouquins, il peine parfois à se faire des amis mais les professeurs sont contents de lui et apprécient son calme. Des camarades essayent de l’embêter, mais quand ils comprennent à quel point sa tête est littéralement dure, ils cessent bien vite. Une force tranquille que Clarence ne veut toutefois révéler à personne. Il n’aime pas la violence et l’évite comme la peste. La lecture lui permet à la fois de voyager dans des endroits insolites, de faire de nouvelles rencontres, de retourner dans le temps, et de rêver d’amour ; à l’instar de celui qui est absent entre ses parents.

De son grand “frère”, Clarence n’aura toutefois que le nom et le physique ; car contrairement à lui, l’enfant apprend vite, se révèle très intelligent quoique naïf, et fait preuve d’une grande douceur. Il ne connaît pour l’instant pas grand chose du monde qui l’entoure, mais il est bienveillant envers cette mère qui ne voit en lui qu’un fantôme de chair et de pierre revenu à la vie. Jade s’en occupe tout de même en tentant de lui inculquer de belles valeurs afin qu’il grandisse pour devenir un gentilhomme qui sera noble d’esprit à défaut du titre. L’enfant est candide mais altruiste et se cultive beaucoup à travers la lecture. Il porte les vêtements de son aîné, joue avec ses jouets, occupe les mêmes espaces.

La santé de son père se dégrade pourtant. Ce dernier, qui ne le reconnaît toujours pas comme son fils, devient de plus en plus agressif, se plonge davantage dans la boisson et les jeux d’argent. L’entreprise manque de faire faillite à cause de lui, mais Jade, qui conservait des parts de son côté, réussit à la sauver in-extremis.
L’année de ses dix ans, son monde bascule. Un soir, alors qu’il veut s’occuper de son père qui va mal, celui-ci lui donne une claque. Clarence ne ressent rien, mais le geste lui provoque un choc. Spectatrice de la scène, sa mère éloigne son fils, c’est sur elle que son mari se défoule. Mais les frappes qu’elle reçoit sont insupportables à voir pour le golem et l’enfant protège sa mère en renvoyant, pour la première fois, des coups. Mais sa force n’est pas maîtrisée et il suffit d’un geste un peu trop brusque pour que Lucien se fasse accidentellement tué.

Première suspecte, Jade tentera d’effacer les preuves pour protéger son enfant mais finira par se présenter comme coupable. La garde de Clarence lui est retirée. Il est recueilli par Francine, la sœur de Jade, qui tient une maison close dans Caldis. Sa tante s’en occupe convenablement même si elle a du mal avec les enfants. Elle est néanmoins plus stricte dans son éducation et tient à ce que le jeune garçon soit poli et bien élevé, pour ne pas qu’on la juge illégitime de prendre soin de lui à cause de son travail. L’entreprise d’imprimerie, elle, fait faillite et est contrainte de fermer avant d’être détruite. La mère du petit lui manque mais il est chouchouté par les employé.es de sa tante pour qui il devient une vraie mascotte. Il s’amuse à se faire pomponner, habiller et maquiller de toutes sortes de façon. Il est ravi : c’est la première fois qu’autant de monde lui donne de l’attention. C’est à travers les habitants et surtout habitantes de cette maison qu’il continuera de s’épanouir. Avec Agathe, il partagera sa passion pour la lecture et les romans à l’eau de rose. Avec Madeleine, il fera la cuisine et les pâtisseries dont il raffole. Avec Marguerite, il apprendra à coudre et à raccommoder des boutons.

Des années plus tranquilles passent pour Clarence qui va voir sa mère dans sa geôle quand il le peut. Il se sent coupable mais fait de son mieux pour être un adulte dont elle pourra être fière. En grandissant, il devient peu à peu un garde du corps pour les employé.es de la maison close, faisant usage d’une force qu’il apprend peu à peu à maîtriser. Il use toujours d’abord des mots avant d’agripper les clients mécontent.es dehors, toutefois, au cas où la parole ne suffirait pas à les convaincre de s’en aller. A l’adolescence, Francine lui intime de décider d’un métier pour qu’il engage des études mais le blondinet a peur du changement et se complait dans sa situation. Il lui demande à rester le gardien de la maison. Quand il atteint la majorité, certains client.es demandent même s’il travaille avec les autres. A ce moment-là, Clarence ne se prostitue pas mais se trouve quand même intrigué, se demandant inconsciemment si ça suffirait à combler le besoin d’affection qu’il ressent depuis quelques années. Mais sa tante refuse qu’il le fasse.

En attendant de trouver quelque chose qui lui plaise, et puisqu’il a la violence et l’armée en horreur, il enchaîne alors les boulots, touchant à tout ce qu’il peut dans la limite de ses capacités. Ce qu’il aime, surtout, c’est la lecture. Il sera pris en tant que bibliothécaire dans une échoppe la journée pendant que la nuit tombée, il occupera son poste de videur à la maison close. Comme d’autres, évidemment, il vit très mal la guerre et le peu dont il a été spectateur a suffi pour que ça soit l’une des choses qui le terrifie le plus. Il souhaiterait un jour voir une ère de paix arriver.

Ce vœu sera exaucé en l’an 1000 où Yggdrasil renaîtra enfin après des siècles de sommeil. La guerre se finit et les pays font enfin la paix pour conquérir ce territoire et découvrir ses habitants qui sortent du sommeil.
Curieux de cette cité légendaire dont il a tant entendu parler dans des ouvrages, Clarence rêve d’y aller. Avec la bénédiction de sa tante et une connaissance à elle, il réussit à obtenir une chambre dans l’un des bordels du quartier des loisirs à Yggdrasil, en échange d’un travail d’agent de sécurité.. Il y a beaucoup plus de monde à gérer qu’à Caldis, mais ça ne lui fait nullement peur. Son rêve serait d’avoir assez d’économies un jour pour pouvoir ouvrir une librairie où les gens pourraient aussi manger de bons gâteaux autour d’un thé ; et selon lui, Yggdrasil est l’endroit parfait pour ça car toutes les populations sont réunies.

Effrayé par les différents incidents qui se déroulent au sein de la cité, Clarence essaye de s’en tenir le plus éloigné possible, mais soutient sans le dire les Eossiens qui aspirent à davantage de droits et de libertés. C’est par curiosité qu’il s’est essayé pour la première fois aux rapports intimes assez tard et qu’il a commencé à en vouloir davantage, appréciant sans doute plus qu’il ne le pensait le contact physique, l’attention, les caresses et la chaleur d’un autre corps, même si c’est toujours éphémère. Il a recommencé alors d’autres fois, moins régulièrement que ses collègues cependant ; mais ça lui a permis de s’ouvrir en parallèle à d’autres choses. Il participe par exemple des fois à des spectacles de drag où il aime se maquiller, se coiffer et s’habiller de façon très extravagante afin d’attirer l'œil et d’éblouir avec une performance artistique. Il est loin d’être particulièrement bon, mais ça l’amuse. Alors sa vie n’est pas bien palpitante : il aspire, en résumé, à un quotidien tranquille, même s’il se sent en vérité parfois seul. Clarence aime cependant voir le bon côté des choses et avancera toujours en essayant de voir la lumière même dans les périodes les plus sombres.