Le siège a amené la peur de l'extérieur, à nouveau. Sans grande surprise, d'ailleurs. Il fallait être fou ou désespéré pour s'aventurer dans les terres sauvages, maintenant : qui donc aurait pris le risque d'être surpris par l'arrivée imprévisible des Pourritures ? Qui donc aurait pensé que quelques pièces vaudraient les risques pris ? Quelques uns d'entre eux, visiblement. Parmi les mercenaires, seuls certains avaient osé accepter les tâches qui s'accumulaient, pour une raison souvent identifique : les prix. Les prix de la nourriture, qui commençaient lentement à s'élever, mais aussi celui des récompenses, qui, grimpait presque à la même vitesse. Il fallait être fou pour oser s'aventurer dans le danger, et un fou se payait plus cher qu'en temps de paix.
Satoshi, en revanche, était plus proche d'un idiot. Du moins, c'était ce qu'avaient marmonné ses semblables lorsqu'il avait accepté un contrat dont le butin n'était pas particulièrement juteux. Il avait ignoré leurs interrogations et leurs commentaires, se contentant de se préparer. Il y avait des chances que cela soit dangereux, après tout, alors il n'avait pas perdu de temps. Le dernier raid avait eu lieu il y a peu de temps : il y avait donc de fortes chances qu'ils disposent d'un petit temps de répit, d'au moins quelques jours. C'était le moment d'en profiter.

Accroupi devant le mouton à terre, le regard fixé sur les plaies disséminées sur le cadavre, l’épéiste ne dit rien. Le requérant était un berger, visiblement modeste (ou pingre, peu importe), qui voyait depuis peu ses troupeaux de bêtes s'amenuiser au fil des nuits. La première suspicion avait été posée sur les Pourritures, mais ces dernières n'attaquaient pas les animaux excentrés, se concentrant plutôt sur les murs de la ville. Puis, ensuite, on avait pensé au loup : mais ces traces de dents, maintenant que Satoshi les regardait, ne ressemblaient pas à celles d'un loup. Elles étaient bien plus petites.
Les sourcils froncés, pensif, il ne fait pas spécifiquement attention à ce qui se passe autour de lui. Du moins, jusqu'à ce qu'il entende un son. Un bruit de pas, plus particulièrement.

« Bonjour. »

Tiens donc...
Silencieux, le visage neutre, il dévisage sans grande politesse la personne qui vient d'arriver. On lui avait bien donné quelques avertissements avant qu'il ne vienne, mais il ne s'attendait pas à ce que cette arrivée soit si rapide. On lui avait expliqué qu'une seconde personne avait accepté la mission et qu'ils devraient donc collaborer, d'une façon ou d'autre. Ce n'était pas gênant en soi, mais d'ordinaire, Satoshi préférait se débrouiller seul. Il ferait avec, non sans que cela ne l'agace un peu, toutefois.

« Vous êtes donc la seconde personne engagée par le berger ? »

Il ignore qui il a devant lui, mais elle lui paraît assez jeune. Peut-être s'est-il tout simplement trompé, allez savoir...