۞ Les drama queens sont de sortie ۞

OS random

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HRP : L'OS se passe dans la soirée du Mini-Event n°2, juste après les évènements du banquet etc. Oui j'avais zappé que l'OS était fini donc voila, c'est très le retard.

Il était déjà tard dans la nuit quand Jill et Lionel franchirent finalement la porte de leur maison. Encore abasourdis par ce qui s’était passé au banquet, les deux comparses allaient probablement se coucher directement. Iels restaient néanmoins très préoccupés par leurs « échanges » qui avaient eu lieu quelques heures plus tôt. Si Jill aurait habituellement fui et remis la conversation au lendemain, elle se sentait mal de le faire, à présent. Elle avait été blessante et lâche et avait vu en quoi cela affectait son partenaire. Elle n’avait vraiment pas envie que la chose se reproduise. Aussi, au lieu de dire « bonne nuit » et de monter directement dans sa chambre, la nécromate se décida à rejoindre Lionel dans le salon en sortant de la cuisine. Elle ne savait pas trop par où commencer.

« J’crois que les effets du serum se sont dissipés. Ce… ça va, toi ? »

Le vampire avait bu un peu d’alcool aussi mais s’en portait clairement mieux que son amie, même si cette dernière se sentait moins pompette maintenant qu’elle venait de se passer de l’eau froide sur le visage.

« Oh, oui, ça va, ne t’en fais pas. »

Bah, euh, si, quand même.

Iels s’étaient excusé l’un.e à l’autre un peu plus tôt, mais Jill restait préoccupée. Si Lionel souriait, comme d’habitude, il avait l’air pensif et un peu travaillé par quelque chose.

« Tu te sens mieux ? Avec l’alcool, tu m’avais dit que parfois, tu... »

Jill hocha doucement la tête et esquissa un geste de la main pour rassurer son partenaire. Elle est plus facilement rendue malade par l’alcool depuis qu’elle est morte, mais, son malaise physique était majoritairement passé. Ses pensées remuaient pour formuler des nouvelles excuses et essayer de s’expliquer sur ce qu’elle avait déblatéré plus tôt dans la soirée. Finalement, elle décida de s’asseoir à côté de Lionel et essaya de se détendre.

« Encore pardon pour… pour tout à l’heure. »
Elle baissa les yeux d’un air coupable. « J-je sais, il faut que je-- que je te parle de- que je sois plus honnête avec toi et Hélène. »

Oui, alors, pourquoi je le fais pas en fait ? Grmbl.

Il n’y avait pas que Lionel et Helène, Jill s’en voulait aussi pour son comportement au banquet de manière générale et sa manière d’avoir fait irruption dans l’espace personnel d’autres personnes alors qu’elle avait déjà bu un verre de trop. Elle s’était comportée comme une gamine et ce n’est pas la première fois qu’elle faisait ça. Elle se disait parfois que briser les conventions sans moindre tact lui donnait un côté imposant. Mais au final, elle déblatérait juste comme une adolescente qui avait besoin de se faire passer pour la plus maligne. C’était étrange, mais, finalement, même avant d’être une nécromate, Jill n’a jamais pris le temps de s’imaginer ce que serait sa vie « plus tard », « si elle avait le temps en dehors de la guerre », bref, ce que serais sa vie si elle était libre de décider comment elle voulait vivre et avec qui. En fait, ça lui faisait simplement peur de sortir de ses routines habituelles, de s’engager dans quelque chose qu’elle n’avait encore jamais essayé. D’être adulte en prenant ses responsabilités et en prenant connaissance de ses propres limites, finalement.  En plus, ce n’est pas comme si ses routines habituelles la rendaient vraiment heureuse, ces temps-ci. Elle n’avait pas envie de se surmener, de se faire du mal et de blesser ses proches (et même des inconnu.e.s) dans le processus. Mais c’est ce qu’elle tendant à faire, avec ces mauvaises habitudes qu’elle ne parvient pas à perdre… et le fait d’être à moitié morte a parfois bon dos pour qu’elle se dise que certains de ses comportements ne font pas sens « mais c’est juste parce que mon corps de nécromate déconne, ça, c’est pas ma faute ».

Je suis la première à dire que je voulais venir ici pour changer des choses dans ma vie, aider des gens mais… au final, à 35 ans, je sais même pas m’aider moi-même ou assumer mes choix.

Elle n’arrivait pas à formuler sa pensée à voix haute, ne savait pas par où commencer. Lionel soupira, puis se pencha afin de se rapprocher un peu, initiant de poser sa main contre celle de Jill.

« Tu… je ne comprends pas pourquoi tu te surmènes si tu as peur de… si tu as peur de t’épuiser et de- »

Il retroussa les lèvres, le regard bas, sa main libre se crispant sur sa manche qu’il se mit à tripoter pour se détendre.

« De mourir enfin, de partir car tu en fais trop. »

La morte-vivante déglutit. Quand Lionel formulait tout ça, ça lui semblait vraiment terrifiant et complètement débile, comme raisonnement… et, oui, c’est elle qui avait dit tout ça. Sans réfléchir. Pas étonnant que son copain l’ait eu mauvaise quand elle avait prit ça à la légère alors qu’il s’inquiétait. Il s’était mis à la fixer avec son air de chien battu et Jill savait qu’il savait comme il était difficile de ne pas craquer et de vider son sac quand il tire cette tronche. Un soupir résigné plus tard, elle serra la main de son amant dans la sienne et reprit la parole.

« J’me disais que si vous me voyiez travailler et sortir et… faire ma vie, ça vous ferait vous dire que vous pouvez faire ce qui vous plait et-- bah, pas perdre de temps avec un poids mort comme moi. »

En soufflant du nez, le vampire baissa les yeux.

« Arrête avec ça... »

Marmonna-t-il d’une voix mi-préoccupée, mi-lassée. Iels avaient eu plusieurs fois cette conversation assez peu évidente et le Roque-Lartigue avait envie que sa copine cesse de mettre sa santé en danger par volonté de ne déranger personne.

« Je sais, si ma mère m’entendait elle s’énerverait et-- »

La nécromate continuait sa tirade, quelque peu à côté de la plaque. Elle avait l’air de dire que ses problèmes étaient énervants plus que préoccupants et même elle commençait à trouver son raisonnement biaisé.

« Enfin, pas énervée mais... »

Je suis conne ou quoi… ? Hélène ne va pas s’énerver pour ça.. huh. Quoique. Elle serait lassée et quand elle me lance des regards noirs, ça fait peur.

La fifille à sa maman pinça les lèvres et regarda ailleurs, réalisant de plus en plus que si elle avait continué de rien dire, les conséquences auraient pu être pires que : boire de l’altio, être pompette, dire des conneries blessantes et aborder des quasi-inconnu.e.s de manière envahissante. Au moins, elle commençait à comprendre et avaient envie de se cacher dans un trou de souris. Lionel était un peu confus, lui aussi. Il haussa les épaules, préférant continuer à parler de ce qu’il ressentait.

« Je ne sais pas. Je ne suis pas énervé, moi.. juste inquiet. Je veux passer du temps avec toi et ça m’est égal si tu es fatiguée ou en forme. »

La Lazarus se tendit un peu, soupirant doucement car elle se sentait bête de ne jamais calculer ce genre d’évidences par elle-même. Tandis qu’elle était occupée à ruminer et à se maudire, Jill se rendit compte que son partenaire s’était rapproché avec précaution, tentant de capter son regard. Lionel avait l’air sérieux, sa main caressa doucement le dos de son amie en espérant l’apaiser.

« Jiji… pourquoi tu ne veux pas nous faire confiance ? »

Cette interrogation fut plus dure à encaisser pour Jill que prévu. Ce n’était pas surprenant, pourtant, qu’à force de ne rien dire, ce soit ce genre de conclusions auxquelles même ses proches finissent par arriver. La nécromate ne put s’empêcher de se mettre sur la défensive car elle n’avait pas envie que Lionel pense qu’elle n’arrivait pas à être vraiment confiante quand ses proches lui disaient s’inquiéter ou vouloir être là pour elle. Pourtant, ce n’était pas si loin de la réalité. Du moins, pas loin de l’impression qu’elle avait d’elle-même, ou de ce qu’elle renvoyait aux autres. Cette impression qu’elle ne devrait pas trop se reposer sur les autres, car ils perdront patience. Car, comme si iels étaient encore, à la guerre, elle les mettrait en danger de mort si elle était un boulet.

« C’est pas ça ! C’est… je sais pas, moi… ! Comment vous pouvez me supporter quand je suis bonne à rien et- »

Cette fois, le vampire fronça les sourcils, visiblement frustré. Il avait envie de comprendre pourquoi Jill en était arrivée à ce genre de conclusions et était ennuyé de ne pas y parvenir.

« Mais je ne te « supporte » pas… je t’aime ! »

Lionel n’élevait que très rarement le ton. Et là, il ne forçait qu’à peine la voix, mais Jill entendait bien qu’il s’emballait dans sa frustration. La Lazarus soutint le regard de son ami et pinça les lèvres d’un air coupable. Elle disait des bêtises, elle savait bien que si c’était sa mère ou son partenaire qui se comportaient de la même manière qu’elle… elle trouverait ça alarmant et malsain.

« Et je ne suis pas aveugle -Hélène non plus, d’ailleurs-. Quand tu ne vas pas bien, on le voit tout de suite. »

Mais… mais ! Oups. Aïe. Mon égo.

Mais, oui, c’est évident, en fait. Je suis en sueur, là, non ?


« On sait que ton état t’handicape et… Tu le sais, que ça ne change rien pour nous, non ? »

Gnnnnnn. Ouille. Mon orgueil aurait quelque chose à dire mais il vient de se faire enterrer bien profond dans des endroits innommables, là.

Cette fois, elle se détourna et avait vraiment envie de quitter la pièce. Elle s’en empêcha, néanmoins. Son corps se tendit à nouveau. Elle tombait des nues, ne supportait pas l’idée que son état l’empêche vraiment de faire des choses et l’oblige parfois à s’en remettre à d’autres. Pourtant, c’était bien le cas.

« Ça… m’handicape pas vraiment. C’est juste pénible et fatigant. »

Parfois c’est même tellement pénible qu’elle ne peut pas se lever. Qu’elle ne peut pas marcher bien longtemps sans canne, qu’elle se fatigue très vite, que si elle n’est pas assez reposée, son humeur et ses sensations deviennent imprévisibles.

Non, clairement, ça va plus loin que quelques petits désagréments ordinaires.

« Hm. Oui, bon, d’accord c’est… c’est handicapant. »

Elle soupira, admettant à mi-voix.

A quoi ça sert de nier et de faire genre devant lui ?

« Mais… mais j’ai l’impression que les problèmes des autres sont tellement plus importants que-- »

Jill s’interrompit un petit moment, se rappelant que mentir sur ses difficultés ou les minimiser en comparant ne lui rendait pas service. Cela ne rendait personne vraiment serein non plus. Elle avait la chance d’être entourée par des proches qui étaient prêts à l’aider et à être présents quand il le fallait, mais pour ça, il fallait aussi qu’elle les aide à mieux comprendre son état. Comme elle avait envie de se justifier et de s’excuser, mais aussi de changer de sujet, ses mots s’enchainèrent maladroitement, sans qu’elle ne fasse vraiment attention à la direction vers laquelle s’en allait sa pensée.

« Désolée je.. je t’aime aussi, tu sais. J’ai fait la gamine. Je voulais pas-- bon, je vous ait inquiété.e.s au final, mais- je voudrais… je veux rester avec toi et qu’on… je sais pas… l’autre jour je faisais mes tours de voyance et je-- »

Huh. Pourquoi je repense à ce que j’ai dit à Rosemarie l’autre jour, là… ? C’est juste que je l’ai croisée y’a pas deux heures… rien de plus hein. Quoique. Depuis des années que je suis avec Lionel et qu’on vit plus paisiblement depuis la paix, j’y pense, parfois, à ce que ça pourrait donner, si on avait des enfants. Mais pourquoi j’y pense maintenant ? Est-ce que… huh. J’imagine que j’étais encore dans le déni, hein… ?

Et elle ne pouvait pas s’empêcher d’y penser avec un sourire attendri, même. Sauf que ce désir devait aller un peu plus loin que « les enfants c’est mignon et rigolo ». Elle ne saurait pas dire si elle se sentait prête, si c’était une lubie passagère ou si elle avait peur d’un tournant aussi important dans leurs vies.

« L-laisses tomber ! »

Oui, ça n’a… ça n’a rien à voir avec la conversation actuelle. Je ne veux pas faire comme si j’essayais de noyer le poisson avec un autre sujet important… quoique… peut-être que j’ai vraiment envie d’aborder le sujet, au fond. J’en sais rien.

« Tu sais, il y a aussi que… quand tu te bornes à rien me dire, des fois, je peux pas m’empêcher d’imaginer que, peut-être que toi, tu ne veux plus que je sois- »

Oh, non…

Jill haussa les sourcils dans une expression inquiète. Est-ce que son ami s’était senti délaissé à ce point ? Exclu ? Elle ne pouvait que se sentir désolée. Son cœur se mit à battre dans sa poitrine en voyant Lionel se forcer à sourire un peu tristement.

La main de la nécromate glissa contre la joue de son partenaire puis se réfugia dans ses longs cheveux bleus, caressant doucement ses pommettes du bout du pouce. Elle se rapprocha et se laissa enlacer doucement par le bleu qui se lova tout de suite dans son cou, comme il avait toujours aimé le faire.

« Je voulais pas être distante ou t’écarter. Enfin… je l’ai fait. Mais je- je suis désolée. Je suis heureuse que tu sois là avec moi. Et je vais faire de mon mieux pour réduire un peu les cachotteries. Et faire attention à ma santé. J’aurais du… je voulais pas voir que ça vous affectait à ce point que je… bref. Pardon encore. »

Et grandir un peu. Ce serait bien que je grandisse un peu… qu’on grandisse un peu. Même si avec toutes ces histoires de « morts mais pas vraiment morts mais quand même morts » et de paix dont on n’a pas l’habitude, ça donne envie de ne surtout pas faire de plans ou de projets car on ne sait pas ce qui nous attend. Mais… c’est aussi le moment où jamais non ? C’est flippant.

Lionel afficha un fin sourire et soupira de soulagement dans le cou de sa comparse. A mi-voix, il reprit :

« Tu me diras même quand tu vas mal… ? »

Je ne vais pas dire que ça m’enchante. D’être honnête sur mon état et dire des trucs comme « j’arrive pas à bouger aujourd’hui ouin ouin ouin j’ai trop mal dis moi d’arrêter de bosser ou de forcer », ça m’enjaille pas vraiment. Je crois que ça ne plaît à personne de devoir faire ça, en fait. Mais il ne s’agit pas de faire plaisir à ma fierté. Il s’agit juste d’être honnête avec les gens qui sont là pour moi et avec moi-même.

« E-euh… je vais essayer. Enfin, je vais le faire. »

Sa gorge était serrée et elle se sentit frustrée. C’était plus fort qu’elle. Ça lui faisait un peu peur, mais comme Helène, Illéas, Lionel et d’autres lui avaient dit des tas de fois… elle devait faire confiance. C’était une nouvelle habitude à prendre. Ce n’est pas agréable de combattre son orgueil pour se montrer en mauvais état face aux personnes les plus importantes à ses yeux, de peur d’être abandonnée à cause de ses faiblesses. Mais… ce n’est clairement pas pire que continuer à ruiner sa santé et à saboter ses relations avec autrui.

Vu comme ça… le deal m’a l’air juste.

Lionel la serra un peu plus fort pendant les secondes qui suivirent. Quand iels s’enlaçaient de la sorte, leur corps ne produisaient plus la même chaleur que lorsqu’iels étaient en vie, mais, Jill pouvait tout de même sentir l’intérieur de sa poitrine se compresser de manière agréable et envoyer quelques vagues de chaleur vers son ventre et son visage. En profitant de sa proximité avec le bleu, elle l’embrassa doucement sur les joues puis s’avachit pour reprendre sa place (enfin, c’est comme ça qu’elle aimait l’appeler) sur les genoux du vampire, de manière à appuyer sa tête contre le torse de ce dernier. Tandis qu’elle se blottissait comme un gros chat en ronronnant presque, ses demandes d’affection firent rire le bleu accéda sans hésiter à ses propositions muettes et déposa des bisous sur son front. La nécromancienne se plaint en gloussant bêtement que ça la chatouillait. En se laissant taquiner, la zombie oublia presque que Lionel avait bonne mémoire et tendance à déterrer des sujets de conversation qu’elle tentait de laisser en suspens.

« Hm… et cette histoire de tour de voyance ? »

…Huh. Queuwa ? Hein ?

Jill qui était en train de s’amuser s’arrêta net dans son opération, « jouer avec le col de la chemise orange de Lionel ». Elle pinça les lèvres et inspira de manière excessive, s’éloignant dramatiquement en regardant partout sauf vers le visage de son ami. Son doigt dessina de petits cercles contre la poitrine du vampire. Elle espérait s’en sortir en essayant de minauder sans vraiment y croire elle-même.

« Tu veux pas plutôt qu’on aille se coucher ? Je vais m’endormir, là, je crois, ohlala... »

Sa voix mielleuse partant plus dans les aigus que d’habitude ne manqua pas de faire sourire le Roque-Lartigue d’une manière mesquine. Elle mima même un bâillement complètement exagéré et absolument pas crédible.

« Ah oui ? Tu ne m’avais pas l’air si fatiguée, à l’instant. »

Peuh ! C’est sournois, ça ! C’est lui qui a commenc—ou moi ? J’en sais rien.

« Oh, eh, euh, t’arrêtes de faire le malin, maintenant ?! »

Elle en était presque à prononcer des « gngngn c’est pas moi d’abbord-euh », c’est dire comme elle ne croyait pas elle-même à la défense qu’elle tentait vainement de se construire.

« Je ne suis pas malin, tu sais que je suis idiot et qu’il faut tout m’expliquer. »

Ah, non, hein, qu’il ne me sorte pas la carte du « je suis bête hihi » ! Pff… en plus il le fait exprès, avec son sourire de démon a grandes dents là.

« Ben voyons ! T’es idiot que quand ça t’arrange, hein ! »

Hah ! Voila, je l’ai mouch—ah. Pourquoi il sourit encore plus en me fixant comme si je venais de faire une blague pas drôle mais qu’il rigole quand même pour me faire plaisir ?

« Pourquoi tu m'regardes comme ça ? »

Jill souffla du nez, gonfla les narines et fronça les sourcils en faisait les gros yeux (enfin, avec un seul œil) en espérant se rendre intimidante.

« Pour rien. Mais je ne suis pas le seul qui fait l’andouille pour tourner les situations à mon avantage, hm ? »

…Alors. Non. Je suis très intelligente, moi d’abord. Je ne fais pas l’idiote. C’est lui, l’idiot d’abord. Gngngn.

« Pffff ! »

Oui, elle n’avait pas de meilleure réponse à donner. Toujours agenouillée par-dessus les genoux de son partenaire, elle croisa les bras en se détachant de lui. Le sourire mesquin du bleu se dissipa et redevint plus apaisant, l’invitant à se confier si cela lui faisait du bien. Le soucis, c’est que Jill se sentait tout de même honteuse de ses doutes sur le sujet du fameux tour de voyance qu’elle avait fait à Rosemarie quand cette dernière lui avait parlé d’enfants.

« C’est ridicule, de toute façon. »

En plus, je m’emballe encore pour des stupides tirages de carte. Bon, peut-être pas si stupide car au final, Rosemarie est repartie avec le sourire et ça faisait plaisir à voir, m’enfin…

Elle avait déjà tiré les cartes avec Lionel. Ce dernier a toujours été intéressé par ces choses-là, mais avait fini par se rendre compte que comme Jill, plus il se plongeait dans ce genre de choses, plus il devenait parano et dépendant de ce genre de « prédictions ». Déjà que l’un.e comme l’autre, iels avaient tendance à laisser d’autres personnes faire les choix à leurs place, ce n’était plus une si bonne idée de continuer dans ce délire ensemble.

« Tu m’intrigues encore plus. »

Il prononça ses derniers mots d’un ton mi-sérieux, mi-rigolard, espérant détendre l’atmosphère. Cela dit, c’est qu’il ne se doutait pas de ce qui allait sortir ensuite.

« Je… la… enfin, la personne à qui je tirais les cartes me parlait de... » Elle hésita, se trouvait elle-même un peu dramatique de se sentir gênée pour quelque chose qui n’était pas si incroyable que ça. « …d’enfants. »

Le bleu eut un moment d’arrêt. Visiblement, il ne s’attendait pas à ce que ce sujet arrive sur la table de sitôt. Enfin, il mentirait s’il disait qu’il ne l’espérait pas un peu.

« Et elle avait l’air vraiment contente quand les cartes disaient que… enfin, qu’elle serait sûrement entourée d’enfants et ça lui a fait plaisir. Et ça m’a fait repenser à Illéas depuis qu’il a Tolan ça lui a vraiment fait du bien et-- bref. »

Même si ça m’a touchée de la voir aussi heureuse, ce n’est pas juste ça qui me travaille.

Réfléchissant à une manière appropriée de tourner ses questions, la Lazarus pinça les lèvres et fixa à nouveau le regard curieux de son partenaire.

« Tu t’imagines avec des enfants, toi ? Tu… nous imagines avec des enfants… ? Je sais que… enfin, je sais que tu les aimes beaucoup. Moi aussi, mais, je me disais que… me disait, avec la guerre et ta famille et tout, ce serait compliqué voire pas possible, mais, maintenant… »

Lionel eut l’air pensif l’espace de quelques instants. Il déglutit sous le coup de la nervosité et répondit à la plus grande par une nouvelle interrogation.

« Tu voudrais qu’on ait des enfants ? »

Ah. Bonne question. Peut-être que j’aurais dû commencer par-là, moi aussi.

« B-bah, on peut pas concevoir, tout façon, mais-- peut-être… ? Je sais pas. Je peux pas savoir, là, tout de suite ! »

Même si ses réponses n’étaient pas claire, ce n’est pas qu’elle essayait pas de noyer le poisson. Elle n’était pas sûre. Elle n’avait jamais osé s’imaginer être mère. Le fait Qu’Helène lui ait toujours dit que cela en valait la peine ne lui avait pas présenté la chose négativement. Mais elle avait tout de même souvent eu l’impression que malgré tout ce qu’elle disait, Helène n’avait que peu de temps pour s’occuper d’elle dans son enfance. Et Jill n’osait que peu en parler, de peur d’être égoïste, mais cela l’avait souvent fait souffrir, quand elle était petite. Sa peur de l’abandon et de la solitude se traduisait souvent par une tendance un peu paradoxale à s’isoler d’elle-même… et en l’occurrence, elle avait très peur de faire les mêmes erreurs avec ses enfants ; d’être trop absente. De ne pas être assez mature. D’abandonner sa progéniture car elle n’aurait pas la force pour s’en occuper. Et puis, évidemment, elle avait peur. De mal faire et… de mourir et de laisser Lionel tout seul dans cette entreprise. Ce n’est pas du tout qu’elle doutait de sa capacité à s’occuper seul des enfants, mais… elle ne voulait pas rater ça, si cela se faisait.

Je… je ne sais pas. Si je ne suis pas sûre maintenant... c’est que c’est mort dans tous les cas, non ? Je ne sais pas… enfin, il parait que je m’occupais bien de Tolan, quand il était bébé, que je suis une bonne tante. Mais je n’ai jamais appris à élever des enfants, moi ! Juste un gros iguane teubé (et toute façon y’a pas grand-chose à faire) et des chats. Urgh. Meuh. Enfin. J’imagine que personne ne peut vraiment apprendre avant d’avoir des gosses. Tu peux lire tous les bouquins que tu veux à ce sujet… je crois pas que ça t’aide le jour où faut changer une couche pleine à craquer.

Tandis qu’elle tentait de comprendre et se remettait à réfléchir de manière un peu trop poussée, au point qu’elle se perdait dans ses raisonnements, le vampire, lui, s’était remis à parler.

« Je crois que j’aimerais bien, moi. Enfin, j’ai… quand j’essaie de m’imaginer plus tard, je me vois avec des enfants. Mais, euh, j’attendais aussi de voir si… enfin, je ne savais pas quand ce serait le bon moment. Et puis ça me fait un peu peur, quand même. »
« Oh. »


Jill ne pensait pas que son partenaire avait des incertitudes similaires aux siennes. Des fois, elle se demande comment serait leur vie, s’ils avaient arrêté d’aller à la guerre quelques années avant la paix. Tout serait évidemment différent. Peut-être ne seraient-iels pas morts, en fait.

Ça ne sert à rien, de faire ça. Je me fais du mal, en me disant que ça aurait été mieux pour tout le monde de ne pas mourir. Ou de rester morte. Je sais pas. Ça complique tout… mais… est-ce que c’est vraiment cette question de morte ou pas morte qui… ? oui, un peu. Mais… est-ce que c’est obligé ? Les choses peuvent toujours mieux se passer. Mais j’aurais aussi pu mourir et ne jamais revenir. On aurait pu ne jamais se revoir, tous les deux.  

Le fait de revenir des limbes force à se dire qu’il faut faire quelque chose de mieux de sa seconde vie. Enfin, Jill a tendance à le prendre ainsi. Comme un moyen de régler tout ce qu’elle a fait de mauvais du temps où elle était humaine. Finalement, cela revenait à simplement tourner en rond avec des choses déjà faites dans une autre vie… une vie qui avait été la sienne. Mais maintenant, il est temps de penser à autre chose. D’apporter de la nouveauté sans attendre forcément d’avoir toutes les certitudes. De sauter dans le vide pendant qu’il est encore temps.

Mais, le fait que Lionel ait des réserves aussi, ça me rassure un peu. J’avais peur de me sentir encore une fois comme celle qui fout toujours la merde… pas que quelqu’un ici m’ait dit ça à part papy et parfois maman quand j’essayais de me faire remarquer, ou les gens au banquet mais… BREF. Je ne suis pas la seule à être paumée. C’est cool.

« J’ai peur de ne pas assumer quand ce sera difficile, tu sais ? Et puis, j’ai eu des parents tellement... »

Si Lionel avait eu l’air un peu confiant lors de sa dernière intervention, les restes de son sourire venaient de s’évaporer de son visage. La nécromate fronça les sourcils, sachant très bien à quoi l’autre faisait allusion sans oser le dire. Du coup, elle termina la phrase sèchement, ne supportant pas de repenser aux récits que Lionel lui avait fait des maltraitances que ses parents et surtout son père lui avait fait subir. Elle refusait d’amoindrir quoique ce soit à ce sujet depuis toujours

« Abusifs ? C’était des enfoirés. »

Le Roque-Lartigue se tendit un instant, puis laissa retomber ses épaules dans un soupir, hochant affirmativement la tête.

« Hem. Oui. Enfin, t-tu vois. Je me dis que, peut-être, je ne pourrais pas faire mieux. Peut-être qu’au fond, je suis violent comme Pèr-- comme Agamemnon. »

Jill se tut pendant un long instant, sans comprendre.

Est-ce qu’il… attends, est-ce qu’il le pense vraiment ? Qu’il pourrait… qu’il est aussi violent que son père ? Qu’il pourrait lever la main sur un enfant et lui faire volontairement du mal ? Est-ce que c’est comme ça qu’il s’imagine ?

« …Lio, je t’ai déjà vu pleurer après avoir écrasé un moustique. »

Sa réaction paraîtra peut-être étrange à Lionel, mais sur le coup, elle n’avait pas trouvé d’autre moyen que de répondre avec une pointe d’ironie. La Lazarus se sentait quand même secouée et attristée que Lionel puisse penser des choses pareilles à propos de lui-même sans jamais oser en parler. Bon, le fait d’avoir été sur le champ de bataille n’aide surement pas à faire la part des choses à l’égard de certains instincts de survie violents.

En plus, il a vraiment pleuré à écrasant un moustique, un soir.

Gêné et se rendant compte qu’il en étant venu à des conclusions absurdes, le Roque-Lartigue se tortilla et se frotta nerveusement l’épaule de sa main libre.

« Mais-euh… mais c’est que les moustiques, je me sens proche d’eux, maintenant ! Vivre en dépendant du sang d’autres êtres vivants c’est pas terrible, tu sais ! »

Oui, bah, euh j’imagine oui, mais je crois pas vraiment qu’il ait vraiment pensé à tout ça sur le moment.

« Bon… j’étais aussi en pleine dépression, ça n’aide pas. »

Voila. Plutôt ça.

La nécromancienne avait envie de redonner un peu le moral à son compagnon et donc, elle caressa doucement ses épaules. A la base, elle ne voulait pas que la discussion réveille de mauvais souvenirs. Mais c’est inévitable. La manière dont on prend soin des autres, encore plus de ses propres enfants est forcément influencée par la manière dont notre propre famille nous a traité.  Ce n’est pas si étrange que cette discussion réveille des choses enfouies et… vieux vaut maintenant que trop tard, finalement. Le bleu se réfugia à nouveau contre sa partenaire et bailla un peu. Peut-être était-il un peu tard pour parler de tout ça de manière lucide et qu’iels étaient fatigués, que les choses seraient plus claires le lendemain.

Jill regarda le plafond et grogna en espérant que les choses pourraient devenir plus claires de cette manière.

« Urrrrrggggghhh... »

Elle soupira, se laissant tomber dans le sofa où elle pourrait bien s’endormir.

« Je sais pas quoi penser. »

J’aimerais bien avoir toutes les réponses là, tout de suite. Arrêter de me sentir immature et stupide dès que je n’ai pas lu de réponse simple, rapide et fonctionnelle quelque part. Ce serait plaisant. Mais ce serait trop facile, hein ?

Elle se redressa et pinça les lèvres, préoccupée par à l’idée d’empêcher Lionel de prendre certaines décisions pour lui-même.

« Si tu veux des enfants de ton côté, je veux pas te faire attendre car je ne peux pas me décider. »

Non, je… je finirais par avoir des réponses plus claires. Mais, pas ce soir.

Le vampire sourit en coin à sa comparse et se leva doucement, prêt à l’accompagner jusqu’à sa chambre.

« Oh, euh… ne t’en fais pas pour ça tout de suite, je-- Il me faut du temps à moi aussi. »

Bon… c’est déjà ça… ?

Elle mentirait si elle disait qu’elle ne se mettait aucune pression au sujet des enfants. C’était un sujet sensible et il leur faudra certainement en reparler plusieurs fois pour y voir un peu plus clair. Ne serait-ce que pour se décider sur comment iels pourraient s’y prendre. Jill se leva à son tour et prit son compagnon par la main pour l’emmener avec elle tandis qu’elle allait se coucher. Lionel profitait souvent de la nuit pour sortir, mais cette fois-ci, il resta avec sa comparse en espérant comme elle que la nuit leur porterait conseil.