Le vase et la goutte d'eau
Ça commence à faire beaucoup /!\ C'est pas très jojo. Sexisme, xénophobie et harcèlement, et potentielle transphobie par la suite. Oui, je ne sais pas ce que je fais actuellement là. Inutile de me poser la question, c'est quelque chose que je me demande moi-même à l'heure actuelle, alors que je suis attablé dans un coin de la taverne, jouant machinalement avec mon verre vide comme pour me donner une façon de supporter mon anxiété. Je devrais rentrer. C'est ce que je me dis à chaque seconde qui passe, mais mes jambes restent enfoncées dans mon siège. Pour rentrer, il faudrait que je fasse quelque chose de spécifique : passer au travers de la foule qui s'agite et qui parle si fortement que j'ai l'impression que mes tympans vont exploser. Ou du moins, c'est ainsi que je l'entends. Car depuis tout à l'heure, la pression monte, monte et monte, jusqu'à ce que le moindre effleurement près de moi ne me fasse l'effet d'une lame de rasoir. Alors, comme un idiot, je suis resté prostré sur ma chaise, les épaules tendues et les doigts crispés. La nuit est tombée, la journée s'est terminée. Sans surprise, les gens s’agglutinent dans les établissements ouverts pour se détendre ou pour aller rencontrer d'autres personnes. Quelque chose, de mon côté, qui m'a toujours plus ou moins indifféré, et dont je me tiens la plupart du temps éloigné. Pas pour une quelconque raison méprisante ou quoi que ce soit du genre, mais plutôt parce que... Eh bien. Je n'y ai jamais été à ma place, disons. Je n'ai jamais compris ce qui pouvait être amusant, et en plus de ça, la surcharge de sons, d'odeurs et de stimulii a toujours été trop intense pour que je m'y attarde de manière superflue. La plupart du temps, quand je viens au Twilight, c'est simplement pour voir Lysia, ou avant l'heure du déjeuner, quand l'endroit est calme et que je peux manger et repartir rapidement. Je ne m'y attarde jamais le soir : c'est trop bruyant, trop bondé, trop... Trop tout, pour dire vrai. Sauf qu'aujourd'hui, une connaissance m'avait demandée de venir, pour une raison vaguement expliquée à la-va-vite. Peu enthousiaste, j'avais malgré tout cédé en me disant que ce serait une affaire finie : une vague discussion devant une planche de crudités, et je pourrais rentrer me coucher. Rien de plus, rien de moins. Sauf que cela va faire une heure que j'attends, et rien. Rien, hormis l'impression saisissante que ma tête va exploser d'un moment à l'autre. Je ne sais pas exactement comme la nausée est montée, mais elle me tient la gorge depuis un moment maintenant, de telle sorte que j'ai l'impression que même le goût de l'eau que je bois est devenu rance. Je n'aime pas l'alcool, ce n'est pas nouveau : ça me révulse, même, depuis un an, sans que je ne sache vraiment pourquoi. L'on pourrait donc m'opposer que venir dans une auberge le soir n'est pas ma meilleure idée : et j'en suis conscient. Je devrais partir. Depuis tout à l'heure, déjà, l'envie se fait pressante, mais mes jambes sont toujours paralysées devant l'idée de traverser ce bain de foule. Stupidement, j'en viendrais presque à me dire que je devrais attendre que les heures passent pour partir à la fermeture, quand plus personne ne sera là. C'est qu'au fur et à mesure que le temps passe, c'en devient presque une solution « crédible ».Tout, mais ne pas se lever, ne pas passer outre la foule, ne pas passer dans l'épicentre du bruit et des odeurs. Mon expression doit faire peur, vu comme elle est devenue renfermée. En théorie. Depuis tout à l'heure, j'ai la sensation que quelqu'un me regarde, avec insistance. Incertain, j'ai tenté de ne pas m'y intéresser au départ, me disant que c'était certainement anecdotique. De toute façon, ma tête n'était pas à ça. C'était le cas jusqu'à ce que ledit individu s'invite lourdement à ma table, de telle façon que le soudain mouvement me fit sursauter, les muscles crispés, gênée par l'arrivée d'une présence familière et d'une odeur agressive pour mes narines. « Bah alors, mon mignon, on fait la gueule ? Tu serais mieux avec un sourire, tu sais. » Je peux sentir mes épaules se tendre rien qu'au ton mielleux et excessivement sucré qui parvient à mes oreilles. Je n'ai pas besoin de me tourner vers le côté pour me faire une idée de l'expression narquoise de la personne qui s'est approchée de moi jusqu'à presque envahir mon espace personnel. Instinctivement, ma réaction est l'immobilisme. Comme si ne plus bouger allait changer quoi que soit. Pour autant, alors que j'espérais peut-être que mon absence de réponse allait convaincre l'homme qui s'est approché de s'en aller, je sens un bras passer autour de mon épaule, l'y nouant fortement. Le contact force me fait l'effet d'une brûlure insupportable, mais sur le moment, je suis comme paralysé. Je n'ai pas l'impression que ça le dérange, au contraire, puisqu'il en rajoute une couche, m'observant avec toute la condescendance et tout la curiosité morbide de quelqu'un qui se retrouve devant un animal rare. « Tu fais le difficile, pour un adorateur d'arbre. D'ordinaire, y savent la chance qu'ils ont à ce qu'on les regarde. On sait complimenter, en plus. Mais bon, avec ta tête, tu dois piocher des deux côtés, hm... ? » J'ai passé l'envie de m'indigner pour le moment : tout ce que je cherche est un moyen de partir de là au plus vite. Je n'aime pas trop la manière dont je peux sentir son regard passer le long de mes robes en toute décomplexion, dont son visage cherche à s'approcher à chaque fois que je recule, dont son bras se serre contre mon épaule, dont son ton se fait insistant et son regard chercher à coincer le mien qui veut tout sauf ça. Les signaux dans ma tête se sont allumés, mais je suis incapable de bouger, alors que ce n'est pas la première fois. « Mais c'est pas grave, j'aime bien les sauvages. Y mordent bien, mine de rien. » Sa main passe sur ma joue comme pour accompagner ses propos. Je ne comprends pas vraiment ce qu'il insinue, mais j'ai assez d'expérience en terme d'approches pénibles dans ce genre pour savoir que je n'ai pas envie de demander des détails. Tout ce qui m'importe est de m'éloigner, mais... Il fait bien deux têtes de plus que moi et le double de mon poids, et je n'ai pas envie de détruire la taverne de Lysia avec de la magie. Alors, sur l'instant, j'écoute mon réflexe. Mes dents se referment d'un seul coup sur le doigt qui s'approchait de trop près de mon visage : le cri qui s'en suit est si bruyant que plusieurs regards se détournent d'un coup vers nous, sans pour autant que quiconque ne bouge sur le moment. « Sale petite... ! Tu veux jouer à ça ? » J'entends mal ce qu'il a dit, mais j'en sais assez pour savoir que ça n'a rien d'amical. Dans tous les cas, alors que sa prise sur mon épaule s'est crispée, je peux sentir que la situation vient de monter d'un cran d'un seul coup. |
ft. Samaël Enodrille 17 avril 1001
Dernière édition par Natsume Shimomura le Mer 29 Juil 2020 - 16:42, édité 2 fois