avec Rosemarie
En arrivant à Yggdrasil, Jill tenait à s’acclimater rapidement à la vie dans la cité. Curieuse, elle avait envie de l’arpenter pour en explorer les différents quartiers et les recoins. Cela l’avait occupée quelque temps, lorsque son corps n’était pas trop pénible et la laissait sortir plus d’une heure en dehors de leur maison de la ville haute. C’est que c’est un peu pénible, des fois : prendre des transports trop branlants est souvent douloureux et pour ce qui est de la marche, eh bien, disons juste que Jill est fort lente et que cela à tendance à la frustrer.
Finalement, la Lazarus s’était tournée vers Dante, son iguane noir géant. Progressivement, elle s’était ré-habituée à grimper sur son dos pour que le gros reptile la transporte à travers la cité. Se déplacer à dos d’iguane n’était pas le plus rapide, mais cela avait le mérite de ne pas trop secouer et de l’empêcher de se fatiguer outre mesure. Puis, comme ça, Jill ne pouvait pas se plaindre de ne pas avoir de temps d’observer les architectures ou le paysage.
La grande perche vêtue de noir descendit ainsi jusqu’à son coin favori du quartier des loisirs. La fin de l’après-midi s’en venait et les gens sortaient de leurs magasins pour se promener et décompresser dehors, ou en rentrant à la maison. A cette heure-ci, il était une petite taverne-cabaret à laquelle la Lazarus aimait bien se reposer. C’était calme et la petitesse du lieu faisait qu’il n’attirait pas la foule, sauf en fin de semaine. Le soir, elle restait parfois à regarder quelques artistes (souvent un peu avant-gardiste et obscurs) après avoir tiré les cartes à quelques personnes qui lui demandaient. La patronne était d’accord que la Lazarus fasse sa divination chez elle. Après tout, l’ex-nécromancienne lui apportait quelques clients supplémentaires et ne faisait que pas payer les gens mis à part quand ces derniers insistaient pour lui donner quelque chose. Elle n’était pas vraiment dans le besoin financièrement, après tout.
Depuis sa table non loin d’une fenêtre aux rideaux violets légèrement opaques, Jill pouvait surveiller Dante qui comatait sous le soleil de la fin d’après-midi, juste après qu’elle lui ait offert quelques fruits pour le récompenser. Le vieux reptile n’embêtait jamais personne, à moins qu’on veille le déloger de force. Là, il pouvait être assez motivé pour courser les gens en sifflant, toutes épines dressées.
Après avoir fait un premier tirage, la voyante joua avec ses pierres et son chapelet de runes, puis laissa son regard s’attarder dans l’établissement et demanda un nouveau sirop à boire tout en observant la taverne au calme, seulement agités par les préparatifs en cours sur la scène le soir-même. Simplement profiter de la quiétude du lieu sans trop penser à ses recherches ou à ses soucis étaient plaisant. Quelques personnes connaissaient le lieu de prédilection de Jill pour ses divinations, mais elle ne voulait pas non plus faire sa publicité (puis, on ne va pas se mentir, elle ne pense pas qu’il y ait tant de monde qui veuille se faire lire son thème astro par un zombie)… elle n’a pas envie de commencer à faire ça à la chaîne, que cela devienne une corvée ou que les gens y attachent trop d’importance. La divination et l’astrologie, ce sont des choses à laquelle la Lazarus n’a pas jamais pu s’empêcher de croire un peu. Mais ce ne sont pas des sciences exactes. Reste qu’il y a quelque chose de rassurant… d’une certaine manière, les choses découvertes avec l’analyse de quelques cartes permettent souvent de se poser d’autres questions existentielles, de voir les choses parfois sous un autre angle. Bref. La nécromate pouvait tergiverser longtemps ainsi, en attendant que quelqu’un lui demande à nouveau de lui sortir un peu de baratin.