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    Le dragon n'est plus, miracle est arrivé. Yggdrasil a protégé sa cité. Des mois de siège éreintant cessent, la ville millénaire respire à nouveau. Chaque soir, sous la lueur émeraude et bienveillante du grand arbre, les éossiens fêtent et célèbrent ceux tombés au combat. Après tant d'épreuves, la ville semble reprendre vie...
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    14 juillet
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    Open wound
    Après la tempête

    Les jours défilent et se ressemblent. Elles ont pourtant bien changé depuis le fameux incendie qui a ravagé une partie de la Ville Haute. J'ai encore ancré en moi les souvenirs du brasier et des bâtiments effondrés à sa suite. J'en ai vécu, des batailles. J'ai porté les corps de compagnons et de frères d'arme. Pourtant... Le souvenir de celui de Alyss me hante encore un peu. L'odeur de chair brûlée, la chaleur de son sang sur mes paumes, son expression à demi éteinte... Je frissonne en me réveillant les matins, troublé par les images qui défilent encore aujourd'hui alors que cela fait... Cela fait... Déjà deux semaines que nous avons surmonté ça. Heureusement j'ai pu écarter ces pensées lors de ma soirée d'anniversaire il y a trois jours. Nous avons bien mangé, bu et dansé. Mais le lendemain j'ai découvert que la plaie que j'avais dans le dos s'était rouverte. Je ne suis hélas pas très motivé pour bouger voir la personne qui s'en occupe mais je n'ai guère le choix, si je ne veux pas que ça s'aggrave. J'aurais pu voir un autre soignant, mais puisque c'est lui qui s'en est d'abord occupé, c'est plus prudent. Pas que je déteste le moine, à présent... C'est plus... Disons qu'après ce qui s'est passé le soir du premier juillet, je ne sais plus trop où donner de la tête. La confusion demeure alors que d'innombrables questions restent sans réponse, alors qu'elles sont pourtant primordiales. J'ai continué à faire mon devoir de Capitaine comme d'habitude mais je ne peux pas dire que j'y mets vraiment autant de cœur qu'avant. Et je vois bien qu'il y a quelque chose dans le regard des Eossiens qui s'est renforcé, et ça ne me met pas franchement à l'aise non plus. J'y vois de la méfiance. Je veux dire... Bien plus qu'avant. Les portes me sont claquées au nez, les commerçants m'évitent, les enfants sont priés de ne pas trop m'approcher... Il y a manifestement une hausse des tensions depuis le début du mois. Je ne peux pas vraiment dire que je suis surpris, cependant. Moi-même je crois que... Je suis un peu perdu face à toute cette histoire. Je veux juste que l'âme d'Adélaïde finisse un jour par reposer en paix.

    L'intérêt de la nuit tombée, au moins, c'est que je ne croise pas grand monde. Une demande de la part de Natsume... Enfin je veux dire du moine Shimomura, pour éviter que nous ne soyons embêtés. Moi, ça me va. Je croise moins de monde à cette heure-ci. Et donc moins de regards méprisants, aussi. On ne risque pas de beaucoup nous interpeller. Je sens mon dos se mettre à brûler un peu mais j'attends d'arriver jusqu'au sanctuaire pour souffler un coup. Je dois faire attention à ne pas me faire trop remarquer également. Je ne pense pas que je serais accueilli en grande pompe, ici. Déjà que même chez nous cela devient de plus en plus tendu... J'imagine pas chez les Eossiens.
    Discrètement, je me faufile entre les couloirs en suivant les indications que Shimomura m'a donné l'autre jour et arrive au niveau de la porte de son bureau. Je toque bien sûr pour savoir s'il est là, avant d'entrer quand il me donne la permission.

    « Shimomura ?.. »

    La porte s'ouvre lentement pour le dévoiler dans un fauteuil roulant assez sommaire mais pratique à utiliser. Surpris, j'offre d'abord un clignement d'yeux, ne m'étant pas attendu à le trouver dans un tel état. Cela aurait pu être le résultat d'un accident. Pourtant je sais, au fond, que c'est lié à ce qui s'est passé à la Ville Haute. Il était là.

    « Je viens pour la blessure. Elle s'est rouverte. Puis-je... ? »

    'Puis-je prendre un peu de votre temps'.
    Je ne finis pas ma lancée. Mes yeux sont perdus dans la contemplation de la pièce qui regorge de livres et d'instruments en tous genres. Je sais qu'il ne s'agit que tout au plus d'un bref examen et d'un changement de pansage, mais je sens une impression étrange de me savoir dans la même pièce que lui après ce qui s'est passé. Va-t-il m'en vouloir à son tour ? Refuser de me soigner ?.. Je suis même venu sans la chienne, pour une fois. Elle s'est bien mieux remise de ses blessures que moi ; pour une raison qui m'échappe mais tant mieux.


    Dernière édition par Samaël Enodril le Lun 4 Jan 2021 - 23:03, édité 1 fois

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    Open wound


    ou au sujet des cicatrices
    Depuis l'incendie, j'ai l'impression que ma tête est dans un brouillard perpétuel. Un marasme de pensées et de sensations, à la fois désagréables et sourdes, qui m'alourdissent la tête du matin au soir. Je n'ai pas beaucoup dormi, ces derniers temps, et quant au repos, eh bien... C'est une bonne théorie, mais ce n'est pas la pratique. Je n'ai pas beaucoup levé les yeux de mon bureau, ces derniers temps, car cela me permettait justement d'atténuer un  peu la piqûre désagréable des souvenirs d'il y a quinze jours. Et en même temps, cela me permettait de faire comme si la blessure que j'avais au flanc droit n'était pas si conséquente que ça, comme si elle ne réduisait pas, même juste temporairement, mes capacités physiques et comme si la douleur ne revenait pas parfois de manière pénible sans que je ne puisse vraiment faire quoi que ce soit. Couplé aux images qui reviennent souvent à ma tête, enfin... Je n'ai pas vraiment eu le temps de penser, ou l'envie, ou même la capacité. J'ai même l'impression que les derniers jours ont été un trou noir, tant j'ai du mal à me rappeler de tous les événements.

    Alors je ne fais plus vraiment attention à ce qui se passe autour de moi quand je suis dans mon bureau. Plusieurs fois, des novices ont dû tambouriner à la porte et l'ouvrir pour que je remarque leur présence, et encore ; c'est donc inhabituel que je réagisse quand quelqu'un se met à toquer soudainement.
    Mes mains, qui tenaient jusque là une plume, se figent. Dans mon esprit, à nouveau, les souvenirs remontent. L'odeur des cendres, la chaleur des flammes à côté de mon corps, les sons distincts et éclatés ; et, enfin, la voix criarde, confuse et colérique de celui qui vient pourtant de m'interpeller pour une toute autre raison aujourd'hui. Sur le moment, je ne réponds pas, immobile, comme gelé. Les images sont comme de petites piques désagréables, à l'instar de la sensation pénible qui remonte dans mon flanc et me fait me crisper quelques secondes, durant lesquelles mon interlocuteur finit par rentrer.

    Reprendre une contenance normale se fait au prix de ma parole. Je me contente d'accueillir le nouveau-venu par un vague mouvement de tête. Si il a voulu venir, il a au moins tenu parole sur le fait d'éviter les moments où il y a le plus de monde. Je ne voudrais pas que les autres moines ou croyants se posent trop de questions en voyant un Capitaine passer par ici, surtout celui des quartiers éossiens. Avant, cela aurait toléré mais mal perçu ; maintenant... Maintenant, j'aurais probablement une migraine.

    « Vous pouvez rentrer. Fermez derrière vous. »

    Je me contente de paroles brèves, sortant lentement mon esprit des images qui me sont remontées à la tête pour faire comme si de rien n'était. Je lui avais dit qu'il pouvait passer pour sa blessure, au besoin. Je m'étonne tout de même qu'elle se soit rouverte après plus d'un mois : la cicatrisation aurait dû faire son effet depuis un moment, mais... Bon, on ne sait jamais, j'ai peut-être fait quelque chose d'incorrect.

    « Asseyez-vous, je vais regarder ça. »

    Je désigne d'un mouvement de tête l'une des chaises qui se trouve tout près, pendant que j'angule le fauteuil dont je me sers pour me diriger dans cette direction. Ce n'est honnêtement pas pratique, et il me faut un essai ou deux pour pouvoir traverser la pièce, mais je ne fais pas de commentaire à ce propos. Je préfère aller directement sur le sujet qui nous intéresse, quitte à ignorer celui assez évident de mon état.

    « Vous avez fait des gestes brusques, récemment ? Appliqué l'onguent que je vous avais indiqué ? »

    Je ne suis ni froid, ni chaleureux. Je ne saurais pas exactement décrire mon comportement, si ce n'est une probable insistance à éviter de penser aux multiples éléphants dans la pièce. Et en même temps, je n'ai pas envie d'y réfléchir trop longtemps.

    ft. Samaël Enodril
    le 14 juillet 1001


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    Natsu grogne et fixe des fleurs en #8A4B08

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    Après la tempête

    L'esprit un peu ailleurs, je ne remarque pas tout de suite le fauteuil roulant dans lequel il est assis. Cela ne me frappe que lorsque je relève le regard vers lui et que je ferme la porte comme il me le demande. Je suis surpris de le voir dans un tel état. Est-ce que par hasard il était présent lors de l'incendie ? C'est de là qu'il se serait potentiellement blessé ? Ou... Ou peut-être que cela n'a rien à voir. Mais il y a eu un tel grabuge... Je sais que la plupart d'entre nous aujourd'hui qui ont des plaies à soigner viennent de ce moment où la Ville Haute s'est mise à brûler. Ma curiosité mal placée voudrait lui demander ce qui lui est arrivé, mais je doute qu'il veuille vraiment en parler ; ce n'est pas pour ça que je suis venu, après tout, et nous ne sommes pas proches. Cela m'intrigue, mais je garde mes questions pour plus tard, me préoccupant d'enlever les vêtements qui pourraient le gêner durant son examen alors que je m'assois, le laissant regarder de plus près la blessure. Ce n'est pas une grosse douleur ; c'est juste vaguement inconfortable. Mais mieux vaut prévenir que guérir et on ne sait jamais ce qu'une infection peut provoquer. En ce qui concerne ma santé, il m'arrive d'être très sérieux. En tout cas, j'applique toujours les conseils qu'on me donne (ou du moins j'essaye). Je ne sais pas trop comment lui expliquer pour les gestes brusques, en revanche.

    « Euh... Oui, oui, j'ai appliqué le truc. Mais vous savez... Comment dire... »

    Je ne le regarde pas directement dans les yeux. Les souvenirs de cette nuit me reviennent comme si je pouvais de nouveau y être. Un frisson m'échappe. Me rappeler de cette soirée ravive légèrement la plaie dans mon dos, dont l'origine n'a pourtant rien à voir avec le grand brasier.

    « Enfin peut-être que vous êtes pas au courant, après tout, mais y'a eu cet incendie dans la Ville Haute et on m'a appelé pour y être, alors je... J'y suis venu pour aider, et... »

    Mon regard se perd sol, comme... vidé l'espace d'un instant.

    « … Une amie avait besoin de moi. »

    C'est encore troublant de me remémorer l'état dans lequel j'ai retrouvé Alyss. Et dire que je n'avais connu ma collègue que sous ses meilleurs jours, fièrement dressée sur son fidèle cheval. Elle était vraiment dans un sale état... Heureusement que je n'étais pas seul pour m'en occuper. Je me racle la gorge pour passer à autre chose.

    « Enfin bref, c'est à la suite de ça que j'ai remarqué le... Bah que ça s'était rouvert, quoi. »

    C'est ce qui nous intéresse, aujourd'hui, après tout. Je lui présente mon dos sans bouger d'un pouce pour qu'il puisse faire son affaire pendant que les événements de l'autre soir me reviennent de plus en plus nettement. Je suis encore assez perturbé par toutes les révélations qui sont sorties. J'aimerais bien... connaître l'avis du moine là-dessus. Mais j'imagine qu'obtenir des réponses ne sera guère facile. Je regrette toutefois de ne pas avoir assez fait attention. Il m'avait pourtant bien conseillé d'y aller mollo. Une grimace apparaît sur mon visage, précédent un soupir las. Je fixe un point invisible par terre qui semble détenir toutes les réponses.

    « … Désolé. Je sais que vous m'aviez dit d'y aller doucement. J'voulais pas gâcher votre travail. »

    Cela m'a réellement embêté de savoir que j'avais rouvert ma blessure même sans le vouloir. Je me sens idiot de ne pas m'en être préoccupé davantage, mais les aveux de l'autre noble m'ont tant chamboulé que je n'ai pas pensé au plus évident. Il s'est pourtant ennuyé à me les faire, ces bandages, après avoir appliqué sa magie dessus. J'espère ne pas avoir tout défait non plus.

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    ou au sujet des cicatrices
    Je vois tant les visages défiler ici depuis les deux dernières semaines que je n'ai même plus vraiment le réflexe de me comporter différemment devant l'un ou l'autre. Le regard plat et la mine neutre, je m'applique presque mécaniquement, sans vraiment nécessairement prendre le temps comme je pouvais le faire avant. Le brouillard dans ma tête me rend plus lent, moins perceptif.  
    Je ne fais pas tout de suite attention à son ton et à la manière qu'il a de prendre des pincettes en parlant ; à vrai dire, je ne le remarque même pas. Il me faut quelques secondes pour réaliser qu'il parle bien du brasier d'il y a deux semaines. Sur l'instant, je m'immobilise, sans un mot. Je ne sais pas quoi dire. Je ne sais pas si je veux dire quelque chose à ce sujet non plus : et encore plus en sa présence. J'ai déjà eu l'occasion d'entendre ce qu'il pensait, à vrai dire, et je ne vois pas vraiment en quoi cela changerait quoi que ce soit. Méfiant, si je me suis tendu, je n'ai pas répondu. Je n'ai pas vraiment la sensation qu'il s'attende non plus à ce que je dise quelque chose.

    Je m'arrête toutefois sur ses derniers mots, plus honnêtes. Ils ne sonnent pas comme des déclarations à la noix que j'ai pu l'entendre prononcer, ou des grands airs insupportables qui ne faisaient que m'irriter. Mon regard se relève, l'inspectant en silence, le visage inexpressif. Il semble sincère. Une particularité que j'ai remarqué comme étant assez rare de sa part, mais par laquelle je perçois une... Peine... ? Je crois. Je crois que c'est ça. Quelque chose a dû se produire, et ce n'est que maintenant que je le remarque. Il semble plus gris que d'ordinaire. Il a... De la peine pour une amie... ? Je sais que cela paraît un peu étrange à dire, mais je n'ai pas vraiment l'habitude de le voir trop inquiet pour une autre personne. Pour sa ch-... Pour l'animorphe qui l'accompagne, oui, mais pour le reste...
    Discret, je le laisse terminer de parler avant de jeter un œil à sa plaie, une légère grimace venant tirer mes traits. Ses excuses me surprennent, me faisant froncer les sourcils, comme si je ne m'attendais pas vraiment à ce qu'il s'inquiète plus que ça de mon travail. Il m'avait souvent donné l'impression de quelqu'un qui ne s'intéressait pas trop aux conséquences de ses actions sur les autres, alors toutes ces informations, d'un coup, sont beaucoup à gérer. Mais la réponse m'est quasiment instantanée.

    « C'est bon. Vous avez une justification correcte.  »

    Ma voix n'est pas froide. Tout au plus, elle semble désintéressée, comme si je n'accordais pas vraiment d'importance au fait que je vais devoir travailler un peu pour rattraper son dérapage. Dans un soupir malgré tout, je défais ses bandages (qu'il fallait de toute façon changer) sans un mot, gardant tout de même un œil sur la plaie. Rien de bien grave, alors je ne devrais pas avoir à dépenser trop d'énergie ; ce qui m'arrange, puisque je ne sais pas si j'en aurais eu beaucoup aujourd'hui.
    Tentant de me concentrer, je ferme brièvement les yeux pour faire appel à ma magie, les mains posées sur la plaie dans une tentative de rendre le processus plus rapide. Lorsque je la sens glisser dans mes veines, comme un vent chaud qui part de mon corps pour venir s'atteler à la tâche, je crois au départ que ce sera simple ; mais alors que la cicatrisation commençait lentement à se faire, un courant électrique désagréable me fit vivement sursauter et m'éloigner d'un coup net dans un réflexe nerveux.

    Le mouvement, brusque, me tire un grognement de douleur alors que ma main se crispe contre ma propre plaie, que je viens définitivement de rappeler à la réalité par mon geste. Grimaçant, je suis un peu stupéfait sur l'instant, relevant mon regard vers mes mains. Cela fait... Cela faisait un moment que je n'avais pas eu mal en tentant d'user de la magie blanche. Sur l'instant, je ne comprends pas. La constation me trouble. Mon regard se voile d'une incertitude qui m'est désagréable. Pourquoi agit-elle ainsi... ? Je ne fais rien de différent, pourtant, j'ai juste... J'ai juste la tête ailleurs et quelques pensées intrusives, m-mais rien de... De bien compliqué pour ma résolution ou pour ma concentration. Par quoi est-ce que je pourrais bien être perturbé, h-hm... ? Par les derniers jours ? Par ce que j'entends là ? N-non.  Non. Rien de tout ça. Ravalant ma salive, je ne relève pas le regard vers l'autre et continue comme si de rien n'était après avoir pris une nouvelle inspiration.

    « J-je... Je suis désolé. Ça ne... Ça n'est pas arrivé depuis un moment. Je vais devoir y aller plus doucement, ce sera plus long. »

    Et plus fatiguant, aussi, mais je me garde de le dire. La fin de la journée arrive bientôt, je devrais arriver à tenir. Je pense. Je peux au moins constater que le soin finit par se faire, bien plus lentement que d'ordinaire malgré tout. J'évite de trop réfléchir au fait que je n'ai pas beaucoup dormi ces derniers jours. Au lieu de ça, je fais ce que je fais à chaque fois que quelque chose me perturbe ; je garde le silence, et je m'emmure dedans. Mais cela commence à faire un moment.

    ft. Samaël Enodril
    le 14 juillet 1001*


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    Après la tempête

    Une certaine fatigue s'est accumulée chez moi ces derniers jours. Je ne peux pas espérer que ma plaie guérisse si je ne prends pas de repos, j'imagine, mais il faut bien quelqu'un pour gérer le Quartier Eossien, surtout justement depuis le brasier. Alors... Je ne veux pas laisser tomber Alyss à cause d'une malheureuse blessure. Elle commence déjà à cicatriser, en plus, non ?.. Cela devrait aller... Je crois. En plus, la magie qu'il utilise est toujours chaude. Il y avait un moment qu'on n'avait pas utilisé de magie blanche sur moi, mais ce n'est pas désagréable. Enfin, 'un moment'... Je repensais aux batailles avec les Caldissiens, mais en vérité... C'était lui, qui m'avait soigné, aussi, la dernière fois. Après que je me sois battu -ou plutôt fait battre- par un grizzli (ou du moins un truc qui y ressemblait). Je suis encore surpris de la douceur qu'il peut mettre dans ses gestes quand il se sert de sorts de soin. Cela contraste assez avec son caractère froid et réservé. Pourtant, aujourd'hui, à l'image de sa magie, il ne prend pas de ton acerbe. Je relève même légèrement la tête quand il semble même approuver ce que j'ai fait alors que je viens de contester mes actions. Il aurait pu trouver que c'était juste une excuse bidon, mais il a choisi de me croire. Je me serais mis un peu en colère, s'il avait réfuté mes propos, cela dit : après ce que j'ai vécu l'autre soir, on ne peut pas dire que j'ai été prendre des vacances. Sans savoir pourquoi, ce qu'il dit me rassure quand même.

    Assis et torse nu pendant qu'il s'occupe de la cicatrice, je ferme brièvement les yeux, apaisé par le courant magique qui afflue de ses mains jusqu'à mon épiderme. J'aurais presque pu dormir debout s'il ne s'était pas tout à coup arrêté, me forçant à tourner un peu ma tête vers lui. Quelque chose semble le perturber. Est-ce que j'y suis allé un peu trop fort ? Ma plaie n'est-elle pas guérissable, après tout ?.. Je le sens troublé. Pourtant il se remet au travail, l'air de rien, avant de s'excuser. Méfiant, je le laisse néanmoins faire tout en étant conscient qu'il y a quelque chose derrière.

    « C'est pas grave, si c'est plus long... »

    Je ne vais pas dire que ce n'est pas son genre de s'excuser, mais avec moi, c'est assez rare. Je le croirais presque malade. Plus je me concentre, et plus je perçois chez lui des signes évident d'un manque de sommeil. En même temps, avec ce qui s'est passé du côté des Eossiens, les moines ne doivent pas être en reste. Son état, en plus, laisse présager un événement qui n'a pas rendu sa vie facile dernièrement. Mes yeux se posent sur le fauteuil à roues qu'il utilise, puis sur ses traits tirés par une absence d'énergie. Je reprends calmement la parole.

    « Vous êtes fatigué. Ce ne sont pas mes affaires, mais vous devriez prendre du repos. »

    Pourquoi lui dis-je ça ? Je l'ignore. Nous avons eu beau nous croiser des tas de fois par un hasard des plus étranges, je ne le connais pas. Nos routes se sont seulement souvent mêlées entre elles dans de drôles de jeux. Sauf que je n'ai jamais ri. Et je rirais encore moins aujourd'hui. Pourquoi devrais-je me préoccuper de son état ? Je n'ai pas de compte à lui rendre, en soit, et il ne m'aime pas non plus. Je me suis mis à être soucieux tout à coup. Il faut dire que je ne le déteste pas. Ce n'est pas mon ami, mais ce n'est pas non plus un ennemi. Au contraire, je le sens bien plus 'tendre' qu'à notre première rencontre même si le mot reste fort. On va dire pour cette fois que je ne suis qu'un simple patient venu demander de l'aide à son médecin. Mais ce dernier aurait sans doute besoin d'une propre assistance... Et la curiosité est un vilain défaut ; c'est pour cela que j'en suis pourvu. Pour cela que je laisse un silence s'installer avant de poser la question qui me taraudait depuis tout à l'heure.

    « Il vous est arrivé quoi ? »

    Je désigne bien sûr son attirail dont il se sert pour marcher, ou plutôt pour... rouler ? Se déplacer. Simple question, à laquelle j'attends d'ailleurs de me faire rembarrer ; mais c'était plus fort que moi. Et puis ça fait la conversation. Pour dire vrai, je me sentirais presque mal d'être allé le voir alors que je ne suis sûrement pas le plus à plaindre. Ce n'était qu'un petit rendez-vous de routine, après tout.

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    ou au sujet des cicatrices
    Agacé par ma propre compétence, mon expression s'est refermée. Je n'aime pas être ainsi troublé par moi-même, et que mes actions soient affectées par ce que je peux ressentir. C'est pénible, tant pour mon ego que pour la certitude que je me suis fait que je peux continuer sans avoir à me poser plus de questions que ça. Alors même si la longueur ne semble pas déranger mon patient du jour, je me garde de répondre. Il ne servirait à rien que je dise que je trouve ça franchement peu glorieux de ma part, quand bien même je le pense. Mon regard, toutefois, dévie légèrement. Bien sûr que ça l'est. Comment suis-je supposé pouvoir m'occuper d'un grand nombre de patients si je me mets à trembler des mains pour une pauvre plaie rouverte... ?
    Son commentaire quant à mon état, toutefois, me fait me tendre d'un coup sec. Mes épaules se sont haussées. Il en rappelle d'autres, plus virulents et insidieux, logés dans un coin de mon esprit.
    Tu es tout le temps fatigué, de toute façon. C'est une bonne excuse.
    Si je ne peux identifier ou comprendre son intention sur le moment, mon corps et mon esprit le comprennent comme un reproche ; car c'est ainsi qu'ils l'ont entendu par le passé, et pas autrement. Je ne suis pas capable, sur le moment, de prendre ce qu'il dit comme une forme d'empathie, même si j'ai conscience que ce n'est ni agressif, ni même une remarque désobligeante. Plus confus qu'autre chose mais ne désirant pas m'y attarder trop longuement, je choisis plutôt de me retourner vers une phrase de repli.

    « Je ne peux pas. Il y a plus urgent que moi. »

    J'évite de m'attarder là-dessus. C'est de toute façon la vérité ; je ne suis clairement pas le plus à plaindre. Je me vois mal supporter l'idée de laisser une personne de côté car j'avais besoin de faire une petite sieste, que je ne ferais pas de toute façon. Je n'arrive pas à dormir, alors inutile de perdre du temps en essayant. Du moins, c'est la lithanie d'excuses que je me donne, comme un ensemble de justifications. Comme une manière de ne pas regarder le bout de mes doigts qui tremble, alors qu'ils sont juste devant moi.
    Je ne m'attendais toutefois pas à ce que l'autre reprenne la parole. Mais dès lors que sa question arrive à mes oreilles, je m'immobilise. Mon expression se fige dans sa neutralité. Je ne réponds pas. Je pourrais donner la même excuse que je donne à tout le monde ou dire une demie-vérité ; car mon instinct grogne à l'idée d'être sincère. Quand bien même il s'agit de mon patient à l'heure actuelle, je n'oublie certainement pas qu'il reste un soldat : par conséquent, que ce n'est pas et ne sera jamais une personne de confiance, ou même une forme d'allié. Je ne peux pas être pleinement honnête, mais je ne peux pas mentir de manière trop évidente non plus. Ce serait trop suspect.  

    Après quelques secondes, ma voix résonne platement dans la pièce.

    « Flèche dans le flanc gauche. Elle n'a pas touché les organes par chance, mais je dois rester assis pour éviter une rupture des tissus et je ne peux pas marcher pour le moment. »

    La cause ne regarde que moi ; et au pire des cas, je trouverai bien une excuse assez simple. Le chaos de l'incendie est une justification suffisante. Après tout, une flèche qui passe ici et là, ce n'est pas si rare, et je peux dissimuler mon mensonge par omission derrière le fait que je n'ai pas envie de rentrer dans les détails.
    Il me faut toutefois changer de sujet. Je n'ai pas envie qu'il creuse trop longuement, alors pendant que mes doigts sont occupés à désinfecter de nouveau la plaie, je change le sujet en revenant sur ce qu'il a dit précedemment.

    « Mais vous ne devriez pas parler de repos, vu la position où vous êtes actuellement. »

    Inconsciemment, un rictus mi-désabusé, mi-amusé s'étire sur mes lèvres. Quoi, c'est un peu drôle, dans le fond, non... ? Je ne sais pas trop. Je trouve ça cocasse qu'il me dise que je devrais y aller doucement quand je suis justement en train de le soigner car il ne l'a pas fait. Si j'étais un peu honnête, j'admettrais l'existence d'un point commun là-dessus, mais je ne le suis pas encore.

    ft. Samaël Enodril
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    Après la tempête
    Je m'indignerais presque qu'il ne se repose pas, mais il est vrai que je ne peux pas trop parler. Cela m'ennuierait toutefois qu'il lui arrive un truc. Je veux dire... Je suis inquiet que ma plaie ne se referme pas si je ne peux plus aller le voir. Enfin, je crois. Il n'a pas l'air médiocre comme soigneur. J'imagine qu'à défaut d'être réticent avec la magie, je n'ai jamais été contre son utilisation pour panser nos blessures de guerre, ou même les autres. C'était bien utile. J'ai parfois été difficile envers ceux qui la maîtrisaient, mais au fond... Je suis bien content de pouvoir compter là-dessus : c'est très efficace. Quand même... Si je voyais un.e de mes recru.es en fauteuil après avoir reçu une flèche, je leur forcerai à prendre un congé. Je ne peux pas vraiment parler pour les mages, mais un soldat n'est jamais efficace quand il est blessé ; et je doute que quiconque puisse être à même d'exécuter pleinement ses fonctions dans un tel état. Mais je ne connais pas sa résistance. C'est vrai que... Il est magimorphe. Je l'oublie, des fois, qu'il peut se transformer en dragon. Il a peut-être une peau très dure... Je ne peux pas en dire autant de moi. Hormis mes compétences au combat, si j'arrive à affronter les maladies en général, je n'ai pas vraiment de pouvoirs qui puissent m'être utiles. Hé... Tu m'étonnes que les humains aient envie de se sentir supérieurs quand ils savent qu'ils ne peuvent pas grand chose comparé aux autres. Je commence à le sentir moi-même. Quoique... Je n'ai au moins plus envie d'avoir la prétention d'être supérieur face au moine. La vie a bien prouvé que je n'aurais pas pu survivre si sa route n'avait pas croisé la mienne à un moment fatidique. Mais au fond, nous sommes pareils sur un point : nous nous mettons en retrait par rapport à d'autres. S'il considère qu'il y a plus urgent que lui, je ne peux pas vraiment dire l'inverse à mon sujet. Connaissant mes soldats, c'est un peu égocentrique mais je n'avais pas envie que l'un d'eux me remplace même pendant quelques jours. Je ne voulais pas quitter mon poste des Quartiers Eossiens. Quitte à ce qu'un Altissien se prenne des regards noirs (ou autre), ça ne me dérangeait pas que ça soit moi.

    « C'est compliqué, parfois. »

    Je souris brièvement d'un air las. Pourtant, je ne me sens pas énervé ou perturbé en sa présence, pour une fois. C'est drôle. Peut-être que mes pensées sont trop embrumées pour que je veuille jouer au plus malin. Je ne veux pas non plus créer d'embrouilles. Pour l'heure, je souhaite simplement me reposer. Le sanctuaire... Il a quelque chose d'apaisant. En me concentrant bien, je pourrais presque sentir les effluves d'Eos imprégner le lieu. Elle a l'air d'y être plus forte qu'ailleurs. Ce n'est probablement pas faux quand on dit que les Eossiens ont un lien plus étroit avec l'Arbre que n'importe qui. Je pourrais presque commencer à comprendre pourquoi ils en sont si protecteurs. Pas que je n'aime pas l'Arbre, hein... Il est beau. Son grand tronc semble indestructible et ses branches feuillues nous recouvrent comme un toit accueillant. Il dégage une sensation familière et inconnue en même temps. J'ai toujours vécu dans les montagnes d'Altissia, et elles me manquent parfois, mais dès que j'ai posé les pieds sur Yggdrasil, je n'ai pas ressenti du tout le mal du pays. L'émerveillement d'une découverte historique, sans doute... Ou la sensation de retrouver un foyer perdu pendant si longtemps. Si mes ancêtres étaient là, est-ce qu'ils seraient heureux de voir que nous avons retrouvé l'Arbre ? Ou au contraire étaient-ils plus nantis dans les montagnes ?

    « C'était comment, avant ? »

    Je me suis remis à parler d'un air plus intéressé, comme si je venais de poser une question innocente.

    « Je veux dire... Il y a... Mille ans ? »

    Je tourne ma tête vers lui, me demandant si je suis assez clair dans mon interrogation.

    « Quel est le plus gros changement qui s'est produit, quand l'Arbre est réapparu ? Est-ce que tout était vraiment si idyllique que l'on raconte ? »

    J'espère qu'il ne prendra pas mal ce que je lui demande. Je sais, ce qui a changé. Nous. Altissiens et Caldissiens. Je sais qu'il risque peut-être de me répondre ça. Mais ce n'est pas ce que je veux entendre. Je le sais déjà. Je veux dire... La vie, en général. Cet Âge d'Or, est-ce qu'il porte vraiment bien son nom ? Je ne veux pas croire qu'il n'y avait jamais de querelle. Jamais de dispute. Cela me paraît irréaliste puisque j'ai baigné jusqu'à aujourd'hui parmi une humanité emplie de défauts, et que je sais qu'on a tendance à idéaliser un peu le passé. Alors je veux entendre, de sa part, si tout était aussi parfait qu'on le dit et que notre arrivée fut le seul point noir au tableau.

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    au sujet des cicatrices
    L'humeur est étrange. Ni grise, ni blanche, ni noire. Je suis généralement habitué à pouvoir la situer dans une de ces trois cases ma foi bien pratique, mais ce n'est pas le cas ici. Il ne me reste donc que ma capacité d'improvisation ; autant dire une catastrophe. Mais je suppose que je ne suis plus à un moment socialement embarrassant de plus, à ce stade, puisque je pourrais les énumérer à la pelle quand il s'agit de nos... Disons, altercations.
    Je me surprends toutefois à ne pas ressentir d'apathie devant son commentaire, alors que c'est pourtant ce qui se produit d'habitude. Même si ce n'est que minime, il tire une forme d'empathie dans ma poitrine qui m'étonne moi-même, et me fait m'arrêter sur l'instant. Je vois ce qu'il veut dire, et je peux sentir le poids des mots. Ce n'est pas quelque chose qui arrive normalement quand nous parlons. D'habitude, la sincérité n'est pas de mise ; et l'acte du banquet (surtout du cidre frelaté) en est un bon exemple. Mais là, sur l'instant, je me surprends à esquisser une moue très discrète, amusé et compatissant.

    Alors que je suis en bonne voie d'en avoir fini avec la désinfection et que je m'attelle à m'occuper des bandages de tissus, je suis étonné par sa question suivante. Elle me fait tiquer, m'arrêtant dans mes gestes quasiment mécaniques. La naïveté évidente dans sa voix me rend perplexe, n'étant pas habitué à une telle tonalité de sa part ; sa curiosité me surprend d'autant plus. Mais quand j'y pense, l'image m'en rappelle une autre. Celle d'un adulte enjoué à l'idée d'expliquer et de partager ce qu'il savait d'animaux qui nous étaient inconnus, bien loin de la condescendance dont j'avais pu témoigner de sa part. Une image qui m'avait détendu à ce moment-là et qui me détend aussi un peu maintenant, ne me faisant pas prendre sa question comme une intrusion un peu voyeuriste, mais plutôt comme un intérêt que je comprends comme sincère.

    … Quand bien même sa manière de résumer les choses est bien simpliste, ce qui me tire un petit sourire au coin que je mets de côté, ne voulant pas paraître hautain. Elle n'a pas mauvais fond ; mais elle est... Enfin. Représentative, disons, d'une certaine manière de nous appréhender de la part des élysians. Ce n'est pas la pire, mêm si elle m'exaspère un peu. Alors je ne lui réponds pas d'une manière sèche, me contentant plutôt d'un gloussement un peu désabusé.

    « Même de notre temps, l'époque de l'Âge d'Or était déjà loin. Quant à si cela était vrai ou non... Cela tient plus de la religion que de la certitude, même si je ne devrais probablement pas le dire ainsi. »

    Ce n'est pas très correct pour un moine de se permettre de mettre des doutes sur l'un des grands principes de sa foi, certes, mais... Je n'ai jamais été très rigoriste là-dessus. Sûrement l'influence de mon tuteur sur moi, quand j'y pense ; lui-même me disait toujours que les écrits étaient davantage des guides que des lois. J'évite toutefois d'en parler avec d'autres éossiens. Certains n'ont... Enfin. De manière compréhensible, beaucoup se sont refermés sur les écrits depuis quelques temps ; et ils n'apprécient pas forcément que l'on appuie sur l'un des rares points où ils sont encore complètement libres. Tout ce qui touche à la conscience et à l'identité est plus que sensible. Mon interlocuteur devrait en savoir quelque chose, même si je ne suis pas sûr qu'il en ait conscience.
    Pour autant, je réfléchis plus sérieusement à sa question que je ne l'aurais cru. La vie d'avant n'était pas ydillique à l'instar des contes, mais... Mon souvenir en est quelque peu biaisé, avec les derniers événements.

    « Je ne peux pas beaucoup en parler, puisque j'ai passé mon enfance et mon adolescence à la maison, mais... Je sais qu'il n'y avait pas de tensions avec les étrangers, même si ce n'était pas simple pour les immigrés. Le seul danger, de mon souvenir, venait des monstres lorsque nous quittions les murs, mais ils ne sont jamais passés au travers. »

    Je pense distraitement aux parents de Raol et aux difficultés qu'a pu vivre son clan pour s'installer, même si ma pensée s'attarde ensuite sur le fait qu'à ma connaissance, aucune vague de bêtes agressives n'a jamais franchi nos murs. Une pensée qui m'emplit d'une certaine fierté, même si je sais que c'est idiot. Quand bien même nous n'avions pas d'armée, nous nous débrouillions très bien pour nous sécuriser des dangers. Même ceux qui étaient plus économiques qu'autre chose, par ailleurs.

    « Il y avait quelques disettes de temps à autre, mais la récolte suffisait généralement à nourrir tout le monde, puisque le clergé s'occupait de la redistribution. Les vêtements et les biens nécessaires étaient accessibles à tous, en dépit des posessions personnelles.  Maintenant... »

    Mon regard se voile un peu malgré tout. Comment dire ça ? Comment dire que nous avons perdu une grande partie de nos terres, que nombre d'entre nous ont vendu ce qu'ils possèdaient pour le louer ensuite ? Que la manière que nous avions de commercer et d'échanger a été entièrement modifiée aux profits de quelques uns ? Que la pauvreté est devenue tellement monnaie courante que j'entends et je vois des drames se dérouler chaque jour ? … Non, la réponse ne lui plairait pas. Alors je me garde de faire un commentaire. Il le sait, de toute façon ; il est capitaine des quartiers où ils nous ont parqué, n'est-ce pas ? Il sait dans quoi nous avons été envoyés. Alors je ne vois pas de raison de maquiller mes paroles par de la douceur, mon expression s'assombrissant.

    « La Ville-Haute était un sanctuaire immense. Il n'y avait que des écoles et des lieux communs. Nos maisons étaient très dispersées ; certains habitaient même dans les bois, ou près de la rivière. Ce que vous appelez maintenant le « Quartier des Armes » était un jardin commun suspendu. »

    J'énonce les faits avec un détachement qui ne sert à cacher que cette époque me manque. Que cela me peine, de voir des hordes de soldats là où il y avait d'ordinaire ce que je trouvais de plus beau chez nous. Que les endroits qui nous servaient de lieux de repos ont été défigurés et appropriés par quelques uns. Je ne cherche pas vraiment à le cacher, même si je ne vois pas l'intérêt de m'y attarder, puisque cela ne le préoccupe sûrement pas.

    « Nous avions juste... Une vie normale. »

    Rien d'exceptionnel, en somme, même si je trouve cela ironique. Nos trois peuples rêvaient d'âge d'or ; maintenant, il n'y a que le nôtre qui espère juste à un semblant de décence. La constatation me tire un peu d'amertume, mais je me contente de noyer ce sentiment aigre dans ma gorge en continuant mon travail.

    ft. Samaël Enodril
    le 14 juillet 1001*


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    Natsu grogne et fixe des fleurs en #8A4B08

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    14 juillet
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    Après la tempête
    Shimomura est honnête. Je crois qu'il l'a toujours été, d'ailleurs. Malgré nos différends, il a toujours répondu à mes questions sans chercher à me juger, même s'il ne m'aime pas et que c'est plutôt compliqué entre nous. Je ne connais moi-même pas grand chose à ce mythe de l'Âge d'Or. Je pense qu'il ne faut pas trop s'y accrocher non plus ; c'était il y a tellement longtemps... Je rêverais dans notre monde d'un paradis aussi beau que celui que l'on décrit, mais c'est impossible. Il y a ici trop de choses qui ne vont pas, trop d'âmes égarées, trop d'injustices à réparer. Même un millénaire avant, les choses n'étaient peut-être pas si différentes ; il y avait des conflits, mais c'était sûrement bénin, et il n'y avait pas de guerres, au moins. Tout le monde était uni. Si je suis plutôt de nature chauvine et que j'ai encore du mal avec certains Caldissiens, je n'ai jamais vraiment approuvé les affrontements qui nous ont opposés à eux. J'ai pu briller par l'éclat de ma lame sur le champ de bataille mais aux prix de vies qui ont été arrachées des deux camps. Les Eossiens, de ce que je comprends, étaient généralement accueillants avec tout le monde et ne craignait que les bêtes des terres inconnues de l'autre côté de leur mur. Les bêtes tenues éloignées de la ville grâce à l'intervention des Eclaireurs.
    Les Eclaireurs...
    Les mêmes qui ont attaqué la Ville-Haute avant d'y mettre le feu. Je repense aux mots du moine qui me les décrivait, quelques temps avant l'incendie, d'une manière plus avenante que l'image qu'ils ont donné d'eux l'autre soir. Je me demande comment ils sont arrivés à être réduits à brûler des bâtiments ainsi. Mais au moins... Au moins j'imagine que grâce à ça, des réponses ont été apportées. J'ai encore du mal à y croire, mais... C'est ainsi, alors. J'aurais juste souhaité que les conditions soient différentes. Qu'elles... puissent être différentes ?.. Si seulement elles pouvaient l'être...

    Sans être un paradis, l'époque du moine semble pourtant tout à fait correcte et paisible, comparé à ce que nous avons. Difficile de dire comment c'était en dehors des murs de la cité, mais en tout cas, pour l'intérieur, la vie semblait être plus simple, vu comment il me la décrit. J'imagine que notre arrivée a complètement changé ça. Moi qui pensais que nous avions trouvé un territoire légendaire qui allait amener une paix véritable entre tous les peuples, je me rends compte que nous sommes loin, bien loin de cette harmonie rêvée et que le chemin à faire demeure escarpé. J'ai parfois l'impression que c'est impossible... Mais j'imagine que s'ils l'ont déjà vécu une fois, il n'y a pas de raison pour que ça ne recommence pas. Des dangers limités seulement par les créatures extérieures, une entraide entre tous... C'est ce qu'on nous avait un peu promis, aussi, en venant vivre à Yggdrasil. Des paroles en l'air que j'ai bu naïvement en pensant que les guerres aussi incessantes que sanglantes étaient derrière nous. Résultat, à peine un an après notre venue, nous avons perdu nos leaders restés jusque là invaincus. Adélaïde... Pauvre Adélaïde...
    Je suis surpris d'apprendre que le Quartier des Armes était très différent, par ailleurs. Un jardin ?.. Cela devait être beau... J'ai fini par oublier tout ce que nous avons remplacé. C'est bien dommage, tout compte fait. Le Quartier des Armes nous sert à nous entraîner, mais il n'y a plus de guerre, et les Eclaireurs n'en avaient pas besoin, eux, pas vrai ?..
    ... Pourquoi on a fait ça ?
    Je cligne des yeux avant de soupirer d'un bref air fatigué, me redressant sur ma chaise. Je regarde par la fenêtre le ciel sans nuage qui s'étend dehors. Pensif. Je tente de m'imaginer la vie d'il y a mille ans. Aucun de nos quartiers modernes. Des jardins en abondance. Il y fait bon vivre. Les plantes sont partout et l'Arbre règne en protégeant ses habitants, ne faisant qu'un avec eux. La magie coule dans ses racines comme elle coule dans les veines des Eossiens à son bord. Les Eclaireurs ne brûlent plus. Ils s'élèvent sur les murs comme des gardiens et repoussent les éventuels dangers. Sans m'en rendre compte, je me suis remis à parler d'une voix plus faible, presque comme un murmure porté par le vent.

    « Alors vous aviez déjà... Un Âge d'Or... »

    Le ciel est la seule chose qui est resté inchangé. La lune est belle ce soir, et elle l'était déjà sûrement alors. Je relève la tête vers elle et sa lumière d'argent.
    Le cadre de son époque n'était peut-être pas considéré comme idyllique pour lui, mais à présent, elle l'est pour moi.

    « Moi aussi, j'aimerais bien le connaître. »

    Je me perds dans mon imaginaire à inventer un monde que je ne pourrais jamais voir autrement que dans des livres et des peintures d'autrefois. Je ne m'en suis jamais préoccupé avant mais je me sens un peu triste de savoir que tout ça est derrière nous. Hé... C'est la vie, je suppose.
    Ou plutôt l'invasion, haha... Haha... Qu'est-ce qui m'arrive ce soir.

    « On a qu'à appeler ça... L'Âge d'Argent. »

    Je tente de vider mon esprit tout en laissant échapper un gloussement idiot. Je crois me sentir un peu fatigué. C'est peut-être la magie... Elle est assez apaisante. Cela me surprend toujours. Comme une bulle chaleureuse qui se pose sur ma peau pour la détendre, à la manière d'un massage. Il ne faudrait juste pas que je pique un somme tout de suite, ça serait peu commode pour le mage.

    « Vous pouvez bien vous reposer, là, non ? Personne va débarquer pour vous appeler, à cette heure-ci. »

    Je m'étire brièvement, veillant à ne pas trop toucher aux muscles près de la blessure. Ce serait bête qu'elle ait une nouvelle coupure à cause d'un mouvement brusque. Les yeux rivés sur le plafond en pierre, j'en dessine visuellement les contours comme si je cherchais à les analyser. Mon expression est redevenue sérieuse, tout à coup.

    « Vous m'aviez dit que vous étiez devenu moine pour vous rendre utile. Est-ce que vous sentez que c'est le cas, alors ? »

    C'est ce qu'il m'avait dit l'autre jour, si je ne dis pas de bêtise. Justification honorable, bien sûr, et je lui souhaite de trouver ce qu'il recherche, si c'est ce qu'il veut vraiment. Mais il a l'air un peu plus lassé à chaque fois que je le croise. Ce n'est sans doute pas lié à sa vocation, mais... disons que aider les autres c'est bien, cependant faire ce qu'on veut avec des choses qui nous passionnent, c'est mieux.

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    au sujet des cicatrices
    Je n'aurais peut-être pas dû être honnête. Dire des généralités m'aurait permis de ne pas avoir à repenser à tout ça, alors que j'essaie pourtant de ne pas le faire ces derniers temps. Alors oui, c'est bien joli que d'énoncer ce qui était bien plus plaisant que notre situation actuelle, mais... La comparaison est désagréable. Et le commentaire d'Enodril, si il me fait vaguement relever le regard, me tire plus une expression fermée qu'autre chose. Je n'irais pas qualifier notre époque d'âge d'or ; ce serait rentrer dans ce grand délire un peu élysien que nous vivions comme des sortes de créatures ingénues et non comme des véritables êtres humains. Mais il y a fort à parier, et mon cynisme m'en convint, que dans le futur, nous percevrons les choses ainsi. Le dernier commentaire du militaire me tire une douleur sourde dans la poitrine et un ravalement d'un commentaire qui serait pourtant bien sorti.
    Ca aurait été possible, si ça n'avait pas été volé.

    Mais, à mon étonnement, je ne lui renvoie pas à la figure. Je n'en ai pas l'envie. Je n'en ai pas le besoin ; inconsciemment, j'ai intégré la notion qu'il doit l'avoir un peu réalisé. Alors, par conséquent, je ne sais pas vraiment comment interpréter sa... Plaisanterie ? Je ne sais pas. Ca ne sonne pas comme une plaisanterie. Mais j'ai bien du mal à le comprendre, alors son gloussement me fait légèrement tourner la tête sur le côté. Serait-il un peu désabusé... ? Je n'ai pas de moyen de le savoir, et je ne vais certainement pas le lui demander. Mais cela me rend plus curieux que je n'aurais pu le croire. En silence, je me contente de terminer ses bandages.
    Je ne m'attendais toutefois pas à ce qu'il renchérisse sur mon sommeil, ce qui me fait froncer les sourcils alors que je m'éloigne un peu après avoir terminé de m'occuper de lui. Perplexe, je ne sais pas comment prendre sa question. Quel intérêt y trouve-t-il ? Encore une fois, je ne saisis pas son comportement envers moi depuis quelques temps. Mais je ne vois pas de raison fondamentale de mentir, quand bien même je détourne un peu le regard en me rapprochant de mon armoire d'apothicaire pour en sortir quelques potions.

    « Je ne peux pas, au sens physique également. Le sommeil ne vient pas. Ou du moins plus. »

    Cette admission me coûte un peu, car ma fierté trouve cela assez humiliant, d'en « arriver à des états pareils pour si peu ». Du moins, c'est ce que me dit ma conscience, et ce qui me rend donc si dur envers moi-même. Mais même au delà de ça, je ne sais pas vraiment comment me reposer autrement qu'en dormant. C'est toujours ainsi que j'ai fonctionné, alors... Je ne réalise pas vraiment qu'il y a bien d'autres moyens. Mais tant pis.
    Alors que je me retournais pour lui tendre une potion à prendre, sa dernière question me prit de court. Son sérieux soudain me fait me tendre, comme si il y avait un sous-entendu dans son propos que je n'arrive pas vraiment à appréhender. D'où lui vient cette pensée soudaine et cette envie de poser une question aussi lourde... ? Silencieux, mon expression ne trahit rien de mes pensées au départ. Je pourrais tout aussi bien lui mentir et ne pas être honnête, mais... Pour une raison que je ne comprends pas vraiment, je ne sens l'envie de le faire. Car cela remue des pensées dans ma tête qui sont on ne peut plus sensibles.

    Une moue désabusée et jaune prend part sur mon visage. Un rictus fatigué sur les lèvres, je reprends la parole en relevant un regard franchement las vers mon interlocuteur.

    « … Quelle utilité a un moine de ma foi, de nos jours, pour ce qu'il y a de plus urgent ? Quel pouvoir ais-je ? »

    La question est rhétorique, et je n'ai même pas besoin de l'énoncer. Avec mon statut, je ne suis pas grand chose ; un éossien n'a déjà pas grand pouvoir, alors un magimorphe en plus de ça. Cela ne me dérange pas en soi. C'est autre chose quand je constate que cela ne fait qu'enfoncer un peu le clou quant à mon impuissance. Ce que je pense n'a même pas besoin d'être énoncé. C'est aussi évident que ma lassitude de plus en plus grande pour cette situation qui se dégrade et contre laquelle je ne peux, dans ma fonction, qu'être inutile. C'est bien pour ça que j'ai rejoint les éclaireurs également, mais... Encore une fois, cela ne garantit rien. Et j'aimerais ne pas être persuadé chaque jour que ce que je fais tous les jours est au pire vaguement superflu ; cela me retirerait un nœud âcre dans la gorge, et cette lueur éteinte dans mon regard qui ne cesse de croître au fur et à mesure que les jours passent. Peut-être.

    « Ça avait du sens. Maintenant... »

    Un couteau dans la plaie en plus. Des déceptions chaque jour. L'impression de participer malgré moi à une mascarade bien plaisante. Je ne termine pas ma phrase, car je ne sais pas moi-même ce que je pense, au final. Je sais juste que si cela a encore un peu de sens, c'est devenu bien, bien trop peu par rapport au passé, et je n'ai pas la sensation que cela s'arrangera dans l'immédiat.
    Mais, alors que je m'apprêtais à me rendre compte que la conversation est devenue bien plus intimiste et lourde, un souvenir me passe par la tête. Un fragment d'une discussion que nous avons déjà eu, et dont je crois repérer les restes chez lui ; est-ce que cela le tracasserait, à tout hasard... ?

    « … Mais vous devez en savoir quelque chose. »

    Mon regard n'est ni hautain, ni là pour juger. Il constate avec une certaine fatigue, au mieux. Sur ce point-là... Sur ce point-là, je peux le comprendre.

    ft. Samaël Enodril
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    Après la tempête
    Je ne devrais pas m'inquiéter pour lui, s'il n'y a rien à faire et qu'il dit que le sommeil ne vient pas. Sans doute qu'il n'a pas besoin d'aide, même dans un fauteuil, mais il a l'air tellement à cran tout le temps... La seule fois où je l'ai connu à peu près calme et doux c'était avec les enfants. Nous n'avons pas énormément parlé de l'incendie, mais je suis persuadé que ça l'a troublé autant que moi. Je n'ose pas tout de suite lui demander d'ailleurs ce qu'il a pensé des actes des Eclaireurs cette nuit-là. Je crois l'avoir déjà bien secoué avec ma question. Si je comprends le rôle des moines et autres religieux, je suis juste curieux de savoir le parcours qu'il a entrepris pour décider de consacrer son temps à la foi plutôt qu'autre chose. Enfin... La foi, l'enseignement et la magie, bien sûr, il n'y a pas que les prières, les cérémonies et le reste, j'en suis conscient. Mais de prime abord, avec son caractère, je n'aurais pas cru avoir affaire à un éoniste. Je n'ai pourtant en soit jamais entendu parler de choses que lui rêvait de faire. Est-ce qu'il n'a pas des projets d'avenir ou des fantasmes qu'il voudrait réaliser ? C'est la question que je me suis posé. Cela semble avoir éveillé en lui des sentiments tumultueux. Il a l'air d'en souffrir. Je l'ignorais. Je pensais qu'il se contentait de la place qu'il avait, mais on dirait qu'il veut réellement faire davantage. Je le comprends...
    Euh non, je ne le comprends pas ! Je... Je suis très bien là où je suis.
    Nos situations ne sont pas comparables, après tout. Mais je sursaute tout de même quand il fait référence à d'éventuels propres frustrations que je pourrais avoir.

    « Euh... Hmm... Ahem... Moi, c'est différent. »

    Je fais mine, bien sûr, de ne pas savoir de quoi il parle et tente de faire taire cette voix dans ma tête qui me répète que je n'ai pas de réelle utilité. Me redressant sur la chaise pour me donner un air qui se veut plus assuré, je tente de ne pas montrer que plus le temps passe, plus je me sens enseveli sous des gravats supplémentaires.

    « Je suis... content de ne plus avoir à aller sur le champ de bataille. La vie est beaucoup plus calme, et puis... Et puis il y a la paix, maintenant. La paix qui... qui... »

    Je... Je ne vois pas de quoi il parle. Je suis très bien dans mon rôle de gardien des rues. Et puis la paix... La paix que nous attentions tous est enfin là. Nous ne sommes plus ennemis avec les Caldissiens. Nous nous sommes unis, et les Eossiens... Les Eossiens ils... nous détestent. Bon, euh... Cela ne peut pas être parfait mais nous survivons, pas vrai ?
    ... Pas vrai ?..
    Je ne finis jamais. Que puis-je dire qui ne serait pas un mensonge, encore plus devant un Eossien qui représentent tous ceux qui ont souffert de notre venue, de ce sommeil de mille ans, et de ces accusations infondées qui ont plu sur eux depuis le début. Je fais moins le fier, à présent. Mon expression se calque sur la sienne et perd de sa vigueur. De sa fausse vigueur. Un léger soupir m'échappe.

    « Je ne me sens pas inutile. Je... Je me sens... »

    Mes poings se serrent au niveau des accoudoirs sur lesquels ils reposent. Plus j'essaye de dissimuler la vérité, plus elle devient évidente.

    « Impuissant. »

    Cette vérité est très, très difficile à accepter. Je peine même, là, à me dire que je l'ai ressenti. Je ne veux pas craindre d'avoir ce genre d'émotions. Et pourtant que je déteste avoir ce sentiment. C'est le pire. Savoir que je ne peux rien faire. Cela ne me posait pas vraiment de problème auparavant car je n'avais pas à y réfléchir, mais... Il y a ici des questions qui ne trouvent toujours par leur réponse.
    Peiné en repensant à notre leadeuse Altissienne, je laisse ma tête reposer sur ma main, le regard s'éteignant progressivement.

    « Je m'en fiche de savoir d'où vient l'assassin d'Adélaïde. Je veux juste... »

    Juste...
    Je finis dans un murmure, la voix s'afflaiblissant en même temps que les lueurs dans mes yeux. Au fond, je ne me sens pas vraiment inutile. Mais il y a des choses contre lesquelles je ne peux rien. Et cette déduction s'offre à moi de plus en plus. A ce stade, peu importe si les personnes qui ont tué les chefs étaient Altissiens, Caldissiens, Eossiens ou même les trois à la fois. Je souhaite seulement trouver un jour les coupables et leur faire payer.

    « Qu'elle trouve enfin le repos. »

    J'imagine que ça ne lui parlera pas vraiment. Après tout, Adélaïde et Hincmar nous ont installé dans cette cité après sa réapparition. J'imagine que les Eossiens ne doivent pas les porter dans leur cœur. Ce n'était pas forcément une excuse pour les accuser puisque ça ne veut pas dire qu'ils étaient prêts à passer à l'acte dans tous les cas, mais ça ne m'aurait que peu surpris. Quelque chose en moi pourtant était convaincu que ce n'était pas Erys qui avait fait le coup. Non... C'était sûr, même.

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    au sujet des cicatrices
    Je ne suis pas bon pour comprendre les gens : c'est même ma plus grande lacune, d'entre toutes. Mais je suis au moins sûr de ce que j'affirme (car ce n'est pas vraiment une question) alors que je le fixe avec un certain désabus. Je l'ai assez vu agir et parler pour finir par comprendre, même si, comme d'habitude, il tente de dissimuler la vérité par une assurance d'apparence qui ne me tire qu'un soupir fatigué. La mine peu impressionnée et crédule, je le regarde donc faire son cirque et prétendre qu'il n'est absolument pas dans cet état d'esprit, en me disant que même moi, qui ne suis pourtant pas bien doué pour repérer les mensonges, n'y croit pas une seule seconde. Il énumère des faits comme on donne une liste de raisons creuses, de faits qu'il a entendu ou vaguement répété sans arriver à les développer puisque réfléchir trop longtemps ne ferait que révéler leur vacuité. Je commence à connaître sa méthode, à force.
    La paix, hein ? Pas pour tout le monde.
    Ce commentaire me tire un rictus désabusé et amer. Je me doute qu'il n'y a pas pensé ; mais cela ne fait que révéler, pour moi, qu'il ne réfléchit pas plus que ça à ce qu'il dit.

    Et à ma grande surprise, la mascarade est trop grotesque même pour lui, car je peux voir son expression se défaire au fur et à mesure qu'il parle, comme si il réalisait la grossiéreté de ses propos en les entendant. Clignant des yeux, je m'étonne de voir quelque chose ressemblant à une émotion sincère sur mon visage, qui me trouble plus que je n'aurais pu le croire.
    Mais la vérité sonne bien plus juste que toutes les justifications préparées et pré-mâchées qu'il pouvait déballer avant ; et je ne suis donc pas tant surpris par ce que j'entends que... Compatissant. La sensation est étrange et m'interroge moi-même, alors que je le fixe sans un mot, sentant dans sa fatigue et sa frustration un sentiment faisant au écho à celui que je garde en moi depuis des semaines déjà. Un reflux d'empathie qui m'étonne, surtout en direction de mon interlocuteur que je considère pourtant même pas comme une connaissance positive et qui me fait cligner des yeux sur l'instant, comme surpris par le serrement dans ma poitrine. Je ne sais pas si c'est une bonne chose, que je ressente ça en direction de quelqu'un que je considérais comme un nuisible il y a encore quelques mois ; alors je ne réponds pas tout de suite. Je m'efforce de dissimuler ce qui peut me traverser, écoutant sans un mot.
    Mais c'est familier. Cela me rappelle ce que j'entends de la bouche des gens venant au sanctuaire prier pour l'âme de leurs proches ; et les questions qu'ils me posent à chaque fois, comme si une réponse pouvait soulager leur peine. Et cela me rappelle, pendant quelques instants, le souvenir d'un enterrement dans l'ombre de tunnels à peine éclairés. C'est différent, toutefois, me dis-je, principalement car je n'ai aucune forme d'amicalité pour la souveraine altissienne décédée. Comme beaucoup des miens, leur nom ne soulevait qu'une forme de rancoeur ; en revanche... En revanche, je peux compatir pour ceux qui sont laissés derrière, quand bien même je ne comprends pas le fait de regretter quelqu'un qui se dit monarque. La peine, en revanche, je la saisis. Le sentiment d'injustice aussi, même si j'estime qu'il y a trois ou quatres mondes entre ces deux cas.

    J'esquisse quelques pas en sa direction, lui tendant silencieusement la potion qu'il doit ingérer sans en dire plus sur le moment. J'oublie, durant une seconde, que je parle à quelqu'un que je m'efforçais de mépriser et de détester il y a encore quelques mois ; tout ce que je vois, sur l'instant, est une âme en peine, comme n'importe laquelle de celles qui viennent se rendre dans ce sanctuaire à la recherche de réponses. Alors mon expression se défait de sa froideur, se faisant plus calme, voir même peut-être plus douce. Plus naturelle. Moins fabriquée pour me donner l'air insondable et inflexible.

    « … Si nous croyons à la réincarnation, c'est aussi pour que la vie offerte à ceux qui viennent après soit meilleure. »

    Même mon ton s'est fait bienveillant. Je ne pense plus vraiment au contexte, dans le fond, prenant la parole comme si je parlais à n'importe qui me confiant sa difficulté à faire son deuil. Un deuil que je ne suis pas là pour juger ; mais auquel je peux compatir. Assis sur mon fauteuil, je prend le temps de parler, ne brusquant ni mes mots, ni ma façon d'agir. Mon comportement s'est fait plus doux, tandis que ma mine devient plus pensive.

    « Je ne crois pas... Je crois qu'il y a un temps pour le deuil. Pour la peine et le regret, et puis... »

    Je m'arrête un instant, le regard plus lointain pendant quelques secondes. Je repense, sans vraiment le vouloir, à la mort de mon mentor et de la douleur que j'avais ressenti ce jour-là ; si je m'attendais à ce que cela arrive un jour, cela ne voulait pas dire que cela ne fut pas dur à vivre. J'aurais aimé qu'il me voit agir comme un moine qui l'aurait rendu fier, j'aurais aimé qu'il profite un peu de sa vieillesse pour se reposer enfin, qu'il ne parte pas aussi tôt... Beaucoup de grands et de petits regrets, emmêlés dans un nœud de peine qu'il avait pourtant fallu que j'accepte pour ne pas y rester coincé. La réponse à laquelle j'étais arrivé, toutefois, me tire un discret mais sincère sourire.

    « Un temps pour ce qui vient après. Pour nous... Si il y a quelque chose à faire, c'est nous assurer que leur prochaine vie soit meilleure ; alors il faut contribuer à ce que le monde leur soit plus agréable, à eux comme aux autres. »

    Je ne m'en rends pas compte, mais mon expression s'est faite douce et plus lumineuse, pendant quelques instants. Je crois sincèrement à ce que je dis, que ce soit pour Thomas à son époque, pour Erys, pour... Pour la personne envers qui Enodril fait un deuil, oui, me dis-je alors que je me rends compte que je suis peut-être en train de parler dans le vide et que ces bavassages de moine ne doivent sûrement être plus agaçants qu'autre chose. Mon expression reprend alors plus de neutralité, et je détourne un peu le regard, comme pour ignorer mon comportement de la seconde d'avant.

    « … Si vous voulez prier en paix, il y a des salles réservées pour ça. Ne vous faites juste pas voir par les autres. »

    Je sais que cela ne plairait pas du tout à certains, de voir un oroniste faire ceci dans un sanctuaire, mais... Pour moi, ça n'a pas grande importance ; ou du moins, le fond est plus important que la forme, dans un deuil.

    ft. Samaël Enodril
    le 14 juillet 1001


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    14 juillet
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    Open wound
    Après la tempête
    L'énergie me manque parfois. Heureusement, me reste la foi. À ce titre, puisque les religieux se chargent de l'entretenir et qu'ils font bien d'autres choses, je ne considère pas qu'ils sont inutiles, personnellement. Les soldats n'ont plus, je considère qu'ils ne le sont pas, et pourtant... Cela ne m'empêche pas de me poser certaines interrogations, et je crois que Shimomura a vu clair en moi comme dans un livre. Je continuerai de mentir à moi-même, mais sa perspicacité a percé le mur que j'avais construit. Il y a fait un trou, mais sans que les brisques ne se fendent. Il les a juste... déplacé pour voir à travers cette brume qui m'entoure. Essayer de me faire avouer des choses évidentes sur lesquelles je souhaite inconsciemment rester aveugle. Ne pas y faire davantage de commentaires pour me tendre une potion que je prends en le remerciant d'un signe de tête. Je ne suis pas encore habitué à le remercier à haute voix, mais... J'imagine que je pourrais m'y habituer, si ça continue comme ça. Je fais de moins en moins le fier, il faut dire. J'ai besoin de d'autres personnes pour m'aider. C'est un peu pathétique. Je ne veux pas que d'autres m'aident. Je veux moi aider les autres. Néanmoins ses paroles suivantes résonnent en moi, comme si cela avait allumé quelque chose. La réincarnation... J'ai envie d'y croire parfois. Je ne sais pas si elle est réellement possible, mais le concept m'attire. C'est merveilleux de se dire qu'une seconde vie peut nous être offerte pour que nous puissions vivre des choses nouvelles, des choses différentes. Pour le meilleur comme pour le pire, d'ailleurs, nous pouvons nous réincarner n'importe comment. Mais il y a alors effectivement une promesse liée à ça. La promesse que nous ferons les choses correctement pour ceux qui n'ont pas pu profiter de leur première vie. La promesse que la seconde et les suivantes leur seront plus favorables.
    Cela fait sens.
    Je sais que je ne voudrais pas que la réincarnation d'Adélaïde voit le monde tel qu'il est devenu après sa mort. Ce n'en est pas un que je veux lui donner. Et ce sera pareil quand j'aurais... Si un jour j'ai des enfants. Il est vrai que, sous cet angle, cela donne envie de croire en l'avenir et d'essayer de l'améliorer.

    « Je n'ai pas... le cœur à ça. Mais... C'est gentil. »

    Poliment, je décline sa proposition. J'ai prié, déjà, plusieurs fois. Après m'être occupé des morts, j'ai voulu me focaliser sur les vivants.
    Je suis parfois fatigué mais je n'ai pas le droit de l'être. J'ai des devoirs qui m'attendent, un rôle à jouer, une loyauté à préserver. On compte sur moi mais j'aimerais pouvoir exercer mon métier sans avoir l'impression qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Qu'il y a quelque chose que je n'ai pas saisi et que je devrais normalement voir. Et surtout je veux des réponses. Je veux savoir pourquoi je me bats. Les révélations de Cervus m'ont bien plus perturbé que ce que je n'aurais cru. La mémoire d'Adélaïde est salie, et nous n'avons toujours pas trouvé le ou les coupables de ce double meurtre. Les Caldissiens aussi réclament sûrement justice. Je sais Gabryel très loyal envers ses souverains, et je suis pareil que lui. Alors je protégerai Gaston, bien sûr, mais... Qui dois-je blâmer ? Donnez-moi des noms. Donnez-moi des raisons. Donnez-moi l'origine de tout ceci, alors que je pensais que nous avions enfin trouvé un terrain d'entente. Mais à chaque pas que nous faisons, nous devons reculer de mille cases, et ça ne s'arrête jamais. Les Eossiens nous en veulent et réclament vengeance. Ils ont perdu quelqu'un d'important, eux aussi. Une victime innocente que nous aurions pu sauver si... Si nous avions agis à temps... Si nous avions fait notre possible pour qu'ils ne l'enlèvent pas. Mais... Il semble qu'ils l'avaient déjà choisi avant. C'était... leur plan.
    Hé... C'est pas juste, en fait...
    Je relève lentement mon regard éteint vers la fenêtre au dehors, comme si je me parlais à moi-même. Je finis par me lever de ma chaise pour m'en approcher et regarder à travers l'ouverture la ville endormie et le manteau d'étoiles au-dessus de nos têtes.

    « Nous nous sommes trompés d'ennemis. Depuis le début, nous nous trompons. »

    La vérité m'apparaît d'un seul coup, comme une lumière qui vient de s'allumer. J'ai essayé de comprendre ce que les révélations amenées par Cervus voulaient signifier. Je crois que je sais, à présent. Que nous aurions dû traiter Erys comme l'un.e des nôtres parce qu'on l'aurait traité avec bien plus d'égards si ça avait été le cas. J'ai de plus en plus cette impression qu'iel a été tiré.e au sort pour servir d'exemple car il fallait une figure symbolique dont la disparition choquerait. Je frissonne à cette idée glaçante. Je ne voulais pas l'admettre, mais depuis ce qu'on nous a fit lors de l'incendie, j'ai la désagréable sensation d'être dirigé à la façon d'une marionnette à qui on tente de faire croire n'importe quoi. Nous sommes si facilement influençables, après tout, quand on est habitué à être docile. Le moine, au moins, a toujours été honnête. Lentement, c'est vers ce dernier que je me retourne, les traits tirés par la confusion et la peine.

    « Ce ne sont pas des excuses qui arrangeront tout, mais... je suis désolé pour ce que les miens ont fait aux vôtres. »

    Je ne sais pas si je lui dois quoi que ce soit de ce genre, mais j'avais l'impression de devoir dire deux mots à ce sujet. Je suis sincère dans ce que j'avance, même si beaucoup d'Altissiens ne partagent pas cette idée, évidemment.

    « Je dois être loyal envers ma patrie, mais... Je commence à comprendre... certaines choses. »

    Ma position est un peu compliquée. Je pourrais envoyer tout balancer, si je voulais, après avoir appris pour le meurtre des souverains et l'innocence des Eossiens. C'est d'ailleurs parfois ce que j'ai envie de faire. Mais autre part de moi est bien trop accoutumé à cette vie de soldat pour que je l'abandonne maintenant. Il faudra attende en réalité la fin de cette année pour que j'y vois plus clair, et que ma vie finisse par changer.

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    au sujet des cicatrices
    La douceur qui fut la mienne s'éteint lentement pour laisser place à la neutralité usuelle dont je fais part envers lui. Pas par hostilité, mais plutôt par sécurité, comme pour éviter de ne trop partager quand j'ai l'habitude que nos rencontres soient au pire insupportables, au mieux vaguement étranges et malaisantes. Mais contrairement à d'ordinaire, je n'ai pas suffisamment levé ma garde pour m'empêcher de me comporter, de me comporter comme... De me comporter sincèrement, oui, sans ces espèces d'airs d'indifférence et de froideur qui me permettent de me percher bien en sécurité. Et cela me fait étrange de constater que la conséquence n'est pas foncièrement négative. Comme si j'avais face à moi une situation paradoxale à laquelle je n'ai pas de véritable explication. Mais de toute façon, j'ai bien du mal à expliquer le comportement de mon interlocuteur depuis un moment déjà ; depuis quelques temps, je n'arrive plus à le faire. Il est devenu imprévisible, ou du moins, plutôt loin de la caricature que j'avais rencontré au début de l'année. Je ne sais, comme à chaque fois, pas quoi en penser.

    Et je ne sais définitivement pas quoi penser de ses propos suivants, qui me font m'arrêter sur ce que je fais. Confus et ne voyant pas où il veut en venir, si je me suis immobilisé, c'est aussi car j'ai du mal à croire que j'a bien entendu. Les énonciations de vérité ne sont pas vraiment quelque chose que j'aurais qualifié comme étant de la capacité d'Enodril ; j'aurais plutôt tendance à dire qu'il était champion en terme de mauvaise foi, en contraire. Sur l'instant, dans un réflexe somme toute assez bête, j'en viens à me demander si il ne fait pas ça pour se donner bonne figure.
    Je ne crois, toutefois, que ce soit le cas. L'observant alors qu'il se retourne, si mon regard conserve une certaine lueur de méfiance, je l'écoute sans l'interrompre. L'humilité dont il fait preuve m'étonne. La sincérité, au delà, et même... Le fait qu'il ne se défausse pas. Qu'il ne se trouve pas d'excuses, qu'il ne se mette pas à geindre qu'il n'a rien fait personnellement, qu'il ne commence pas à faire des comparaisons qui n'ont pas lieu d'être et qu'il ne s'attende pas à être acclamé pour des banalités tout juste décentes... Mes yeux s'écarquillent un peu. Je ne sais pas quoi dire. J'ai du mal à y croire. Si son commentaire sur sa loyauté me tirerait une grimace de dégoût en temps normal, je suis trop perplexe et ébahi pour vraiment y attarder ma pensée. Qu'est-ce que... Est-ce que je parle vraiment à la même personne que j'ai rencontré il y a plusieurs mois ?

    Je n'ai pas vraiment de propos tout prêt à lui présenter. Pas de formule, pas de répartie grinçante, pas de sarcasme affuté pour le faire tourner en bourrique et m'amuser de ce semblant de tourment invoqué par vengeance. Au lieu de ça, quelques secondes passent. J'aurais du mal à décrire le sentiment qui fourmille dans ma poitrine ; un mélange de peine, de fatigue, et de... De soulagement... ? Je n'en sais rien, mais ce qui s'y agite est un vrai imprévu. Perturbé, je ne saurais dire ce que je dois faire. Ce que je dois dire. Ce que je peux ressentir, à l'heure actuelle, alors que je détourne le regard, comme si j'avais du mal à tenir le sien quand, de mon côté, je peine à mettre les mots sur ce qui me traverse.

    « … Merci. »

    Je le prononce à voix basse, comme si j'hésitais, mais la lueur fatiguée dans mon regard en dit peut-être plus que ce je pense. Un léger poids s'est enlevé de ma poitrine. Pas grand chose, mais juste assez pour que perçoive sa disparition. La sensation lourde qui reste, je ne saurais l'identifier exactement. Je ne sais même pas ce que je pense vraiment de ses excuses, si ce n'est qu'il remonte un peu dans mon estime de par sa capacité à être enfin à peu près lucide avec lui-même et ne pas fuir ses propres torts. Cela me laisse dans une situation que je n'avais pas prévu.
    Angulant ma chaise roulant de telle sorte à me diriger vers un autre coin de la pièce, sans non plus me mettre dans mon bureau. La manière dont l'autre se comporte et se rapproche me rend incertain quant à ce que je dois faire. Quant à ce que je veux faire. Après plusieurs longues secondes, je finis par reprendre la parole, le ton plus lent. J'ai besoin de revenir sur quelque chose d'à peu près neutre pour ne pas penser au fait que ma poitrine s'est alourdie, comme tirée par un poids.

    « Si vous voulez être utile, modérez-vous. Si la plaie continue de se rouvrir, vous risquez une infection, et je ne vous cacherais pas qu'une infection sur cette zone serait gravissime. »

    On ne peut pas amputer un dos, après tout, alors je n'ai pas vraiment besoin d'insister. Mais cette fois-ci, je le fais de manière plus directe et en appuyant bien sur le danger de la chose, mon regard partant de lui vers quelques onguents que je prépare pour qu'il parte avec. Le dos tourné, l'expression pensive, je fais une pause et ce dernier s'arrête un instant sur son visage, calme mais plus sérieux.

    « … Si il peut y avoir quelques bons germes dans l'armée, autant qu'ils ne disparaissent pas. »

    Je ne fais pas plus de commentaire. Je n'en ai pas l'envie, surtout après ça ; et c'est d'ailleurs le moment que je choisis pour reporter mon attention vers mes potions, me préparant à les lui donner pour qu'il n'ait pas à revenir à chaque fois. J'ignore, très volontairement, la portée de mes propres propos. Je ne suis pas encore vraiment prêt à admettre qu'il n'y a pas que lui, dont le comportement et la perception ont changé. Lentement, toutefois, les graines s'implantent.

    ft. Samaël Enodril
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    Après la tempête
    Je ne me sens pas vraiment proche des Eossiens en dépit de mes quelques maigres essais. Je pense ne pas pouvoir réellement les comprendre, pour le moment. Mais si j'ai eu du mal à reconnaître nos torts, je conçois de mieux en mieux que nous ne sommes pas un pays parfait et que nous avons peut-être fait des erreurs. Je n'ai pas digéré les propos de Pilate, l'autre jour. On nous a menti. On nous a tous menti et on a fait passer un.e innocent.e pour un.e coupable afin de faire passer la pilule et de donner satisfaction au peuple en faisant croire qu'on avait obtenu vengeance. Mais il n'en est rien, et c'est même pire, à présent. Je ne peux pas tourner le dos à la patrie qui m'a élevé mais j'ai un goût très amer en bouche. Et surtout je me rends compte de plus en plus que les personnes qui ont été les plus honnêtes avec moi depuis notre arrivée sur Yggdrasil sont les natifs eux-mêmes.

    Je ne sais pas comment accueillir ses remerciements, mais j'y réponds avec un bref hochement de tête. Je ne lui disais pas ça pour recevoir de l'attention, mais au moins cela veut dire qu'il comprend ma sincérité et veut bien l'accepter. Il n'est peut-être pas si rancunier que ça... Quand j'y pense je crois... Que j'ai pas été très buvable moi-même. Je n'ai aucun mal à concevoir toutefois que la zone touchée est problématique si on ne la traite pas. Je crois que j'ai plutôt intérêt à suivre ses recommandations et à faire attention. Je n'ai pas vraiment envie qu'on m'écarte de mes fonctions tout de suite, j'ai encore du chemin à faire et une place de général à prendre.
    B-Bons germes ?..
    C'est peu dire que je ne m'attendais pas à ce qu'il... dise quelque chose de gentil ?.. Je sens le rouge me monter aux joues, surpris par ses paroles dont je n'ai pas l'habitude avec lui.

    « Ehm... Euh oui je... Je-Je ferais attention. »

    Tortillant une mèche de cheveux sous le coup de la gêne, je tente de ne pas porter mon regard sur lui pour cacher ma maladresse. Je ne pensais pas un jour qu'il serait aimable avec moi, alors que... Je n'ai pas fait grand chose. J'estime ne pas mériter qu'il me considère tout de suite de cette façon, pourtant je ne fais aucun commentaire à ce sujet, acceptant ces quelques propos qui, malgré tout, me font plaisir. Erf... Pourquoi suis-je si faible...
    Me raclant la gorge pour penser à autre chose, mes yeux se posent sur le bureau dans un coin de la pièce et sur le fauteuil qu'il est obligé d'utiliser. Je me sens chanceux de ne pas m'être pris une flèche, d'un coup. Je ressens... un semblant de peine en le voyant être forcé de se déplacer dans ces conditions. En outre, contrairement à ce qu'il a dit...Je ne pense pas que son rôle soit dénué de sens.

    « Je pense que... Que la foi est bien plus importante que l'armée. »

    Je me remets à parler, d'une façon un peu plus timide cette fois. Je ne veux pas non plus dire de bêtises, mais... C'est ce que je pense.

    « Enfin... C'est ce qui a causé des guerres avec les Caldissiens pendant un millénaire... Mais... »

    Oui, je n'oublie pas que c'est en grande partie ce qui a causé une scission, cette histoire de dieux. Oros, Omnis... Force ou sagesse, plutôt que d'en préférer un seul, nos ancêtres se sont divisés. Je ne sais pas vraiment pourquoi ils ont décidé qu'ils devraient à tous prix se combattre plutôt que de travailler ensemble pour partager des connaissances, mais voilà où on en est rendus. Au moins, avec les mélanges entre nos deux pays, j'espère que la guerre ne refera pas surface tout de suite. Avec les Eossiens, de toute façon, on a d'autres choses à gérer que de continuer à se quereller.

    « Je trouve que c'est... C'est un pouvoir très fort. Qui peut avoir un énorme impact. »

    Je ne sais pas vraiment pourquoi je lui parle de ça. C'est seulement le ressenti que j'ai. Si on avait tous un seul dieu à prier, je suis certain que nous serions plus unis et moins divisés. La paix que nous rêvions d'obtenir se serait faite depuis longtemps... Mais on ne peut pas changer l'Histoire. Je voulais juste lui dire que ce qu'il faisait n'était pas vain.

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    au sujet des cicatrices
    L'ambiance s'est faite étrange, je peux le sentir. Ou du moins, elle a divergé vers quelque chose auquel je n'étais pas habitué et que j'essaie de ne pas considérer en m'occupant comme je le peux ; cela doit bien faire trois fois que je revérifie le contenu de mes fioles. Je ne fais même pas de commentaire quand il m'indique qu'il « fera attention ». Il n'y a pas de raison que je m'en fasse, non ? Ce n'est pas quelque chose qui doit ou me préoccupe vraiment, en plus de ça. Ou, enfin... Pas tant que ça. Vraiment. J'esquive cette pensée en hochant vaguement de la tête, remerciant le fait que mon visage ne soit pas tourné en sa direction et que je n'ai du coup pas à gérer d'échanges de regard embarrassants.
    Mais son affirmation suivante me surprend encore. Que lui arrive-t-il, aujourd'hui... ? Je serais presque dubitatif quant à son état de santé mentale, à ce stade, me retournant avec une confusion claire inscrite sur mon visage. Que cherche-t-il à dire, voir même à provoquer ? Si je suis d'accord avec ses paroles (quoi, vous attendiez-vous vraiment à ce que je dise que j'ai une estime de l'armée ? Moi ?), je ne comprends pas d'où elles viennent. Mon réflexe est de croire qu'il cherche à gausser mon ego, mais je me rends compte instantanément que ce ne sont pas des paroles creuses en l'air. Son hésitation et la timidité (???) que je sens de sa part me font me détendre un peu, quand bien même je ne suis que plus dans l'incompréhension.
    Qu'est-ce qui lui prend... ?

    Bien que son raisonnement simpliste au possible me fasse tiquer (mais je suppose que lorsque l'on a ingéré des kilolitres de propagande, on finit forcément par l'intégrer même quand elle est absurde), je crois percevoir chez lui une... Une tentative d'approche ? Je n'en sais trop rien. Je le fixe avec un mélange d'incertitude et de surprise. Pas de méfiance, toutefois. Je ne suis pas sur mes gardes, même si son comportement serait assez étrange pour que je me pose des questions d'habitude. Je suis plus désemparé qu'autre chose, ne comprenant pas vraiment ce qu'il tente de me dire. Est-ce qu'il essaierait... De me mettre du baume au cœur, ou quelque chose du genre ? … Ça n'a aucun sens. Pourquoi voudrait-il faire ça... ? Il n'y a aucun intérêt direct. Pour se faire bien voir des autres éossiens, peut-être... ? Pour avoir une piste sur les éclaireurs... ? … Non. C'est trop discret, trop timoré pour que ce soit ça. Du moins, je le crois.

    Sans répondre tout de suite, je l'examine comme si je cherchais à trouver la trace d'un mensonge sur son visage. Mais il n'y en a pas. Le jour et la nuit, littéralement. Me détendant un peu, ce qu'il dit me tire toutefois un rictus amer mais simplement fatigué, sans méchanceté.

    « … La foi soulage, mais elle ne protège pas les miens. »

    C'est le constat auquel je suis arrivé. Sans nier le fait que le spirituel me paraît plus puissant sur le long terme et d'une efficacité redoutable de manière proportionnelle... Il reste toutefois que ce n'est pas avec quelques mots que l'on se défend et que l'on protège les autres. Il faut un minimum de poids et de pouvoir pour ça, et je ne peux pas y contribuer ainsi. Pas officiellement. Pour que la foi puisse avoir un impact, encore faut-il disposer de quelque chose à renforcer. Pas juste... Pas juste quelques âmes à soulager en sachant bien que leur peine n'est pas finie. Par ailleurs...

    « Si il y a une chose que j'ai pu apprendre au cours de mon office... C'est que la religion n'est jamais la véritable raison d'un conflit. Il s'agit simplement d'un prétexte pour ce que l'on ne veut pas énoncer. »

    Il n'y a pas de jugement dans ma voix : pour moi, il s'agit d'un simple fait. Je le trouve assez naïf, mais je ne m'en étonne pas tant que ça du fait de son passif. En outre, je crois savoir de quoi je parle. Même en ayant la même foi, il finit toujours par advenir des conflits qui prennent la religion comme excuse. Pour cause, lorsqu'une dispute violente éclatait entre des moines sur un sujet 'exclusivement religieux'... Ce n'était jamais la véritable cause. En creusant un peu, il y avait toujours autre chose : le prestige, le pouvoir symbolique, les conséquences économiques... Mais l'excuse était bien bonne, puisqu'elle agitait les passions, alors ils n'allaient pas se gêner. Une guerre ne perdure pas mille ans pour de simples raisons religieuses ; en revanche, c'est une bonne manière de les justifier à ceux qui ont tout à y perdre pour qu'ils y adhèrent à leur tour. Mais je ne le dis pas plus expressément. Je ne crois pas qu'il soit prêt ou même assez lucide pour l'accepter.
    Pour autant, je ne m'arrête pas là. Je lui jette quand même un coup d'oeil, ne souhaitant pas, pour une raison qui m'échappe, qu'il croit que je rejette fondamentalement sa tentative d'être... Je ne sais pas. Aimable ? Compatissant... ? Je n'en sais rien et je ne devrais pas trop m'interroger à ce sujet, dans le fond. Mais je souhaitais quand même répondre un peu.

    « … Mais j'apprécie la pensée. »

    Je parle à voix plus basse, sans non plus le regarder. Je ne sais pas vraiment ce qui se passe, mais je crois ne pas être le seul dans ce cas-là.

    ft. Samaël Enodril
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