Cela faisait un moment maintenant que je n’avais pas eu à officier de cérémonie d’intronisation de ce genre ; et encore moins à Yggdrasil, à vrai dire. D’ordinaire, cela se faisait dans notre domaine familial : il y avait même tout un ensemble de rites et de vieilles traditions qu’on m’avait enfoncé dans un coin de la tête dès mon plus jeune âge. Accueillir les affiliés via l’entrée familiale, faire passer le ou la nouvelle venue par l’entrée des invités, laisser les parents venir « défendre la cause » de leur adoption (oui, oui, je sais, ce n’est pas génial, les moeurs de nobles), laisser l’adopté.e se présenter devant tout le monde et enfin, terminer tout ce processus long et interminable par une diatribe grandiloquente sur les liens d’honneur et tout le tintouin… Autant dire que ça ne m’a jamais enjoué. Cela dit, j’admets que je crache un peu dans la soupe ; ma famille est l’une des rares à être aussi accueillante avec les adoptions et à étendre le rituel d’intronisation souvent réservé aux époux et épouses à de véritables nouveaux entrants. C’est un peu notre marque de fabrique, en même temps, et notre plus grande tare aux yeux de ses détracteurs. Généreux et bienveillants pour les uns, ambitieux opportunistes pour les autres. Je ne dirais pas que ces derniers ont entièrement tort, toutefois. Ce n’est pas pour rien, que seuls les loups héritent, par chez nous.
Toujours est-il que cette cérémonie en particulier a tardé, en outre. C’est-à-dire qu’avec l’attaque du dragon, j’avais autre chose à souper que de m’occuper de ça et qu’il aurait été bien malvenu de ma part d’organiser une large réception à un moment où les vivres manquent un peu partout. Puis, il aurait fallu que je retourne à Altis quelques jours, et ce n’était pas possible.
Nous avons toutefois trouvé un compromis, au final assez original. Puisque les Van Horn, le paternel ayant pris le nom de son épouse, résident actuellement à Yggdrasil, l’occasion était toute trouvée. Pour la première fois, cette cérémonie normalement très guindée se déroulerait dans la cité millénaire. Cela ne me déplaît pas en soi. J’ai abandonné l’idée de bouleverser toutes ces traditions il y a un moment maintenant, mais je ne rechigne jamais à l’idée d’amener un peu de changement.
Ce soir, je suis accompagné, en outre. Kenaï et Nadja, mes enfants aînés, n’ont pas pu faire le chemin jusqu’à Yggdrasil pour représenter leur génération, mais leur remplaçant était tout trouvé en la personne de Soren. Il est certes encore un peu jeune, mais il n’a pas grand chose à faire de plus qu’observer et saluer. Et puis… Je ne vais pas mentir, c’est aussi une bonne justification pour passer un peu plus de temps avec lui.
Rajustant le haut de mon veston, je jette un coup d’oeil à travers le balcon, guettant le moment où nos invités finiront par arriver. Sans surprise, la demeure qu’on m’a confié en tant qu’ambassadeur d’Altissia est démesurement grande pour rien ; elle m’angoisse un peu, d’ailleurs, comme le faisait le domaine familial quand j’étais plus jeune. Difficile toutefois de réunir autant de monde pour des festivités soporifiques et on ne peut plus scriptées autrement, toutefois. Mais bon, je suis plutôt doué pour faire la conversation et les cérémonies de présentation ne sont pas les pires ; parfois, on découvre de chouettes personnes. En tant que chef de famille, c’est aussi la manière la plus efficace que j’ai d’avoir une vision globale sur l’état de tout le monde.
Je jette un bref coup d’oeil vers une tête bleutée non loin de moi. Soren semble bien agité, et je ne retiens pas un petit sourire amusé en le regardant se préparer. Je prends la liberté de passer dans son dos discrètement.
« Ton pourpoint est mal boutonné, jeune homme. »
Bon, d’accord, je suis un peu vache, mais… Mais rien, vrai que je suis un peu pénible, des fois, comme père ; c’est juste très tentant, de l’enquiquiner.
Toujours est-il que cette cérémonie en particulier a tardé, en outre. C’est-à-dire qu’avec l’attaque du dragon, j’avais autre chose à souper que de m’occuper de ça et qu’il aurait été bien malvenu de ma part d’organiser une large réception à un moment où les vivres manquent un peu partout. Puis, il aurait fallu que je retourne à Altis quelques jours, et ce n’était pas possible.
Nous avons toutefois trouvé un compromis, au final assez original. Puisque les Van Horn, le paternel ayant pris le nom de son épouse, résident actuellement à Yggdrasil, l’occasion était toute trouvée. Pour la première fois, cette cérémonie normalement très guindée se déroulerait dans la cité millénaire. Cela ne me déplaît pas en soi. J’ai abandonné l’idée de bouleverser toutes ces traditions il y a un moment maintenant, mais je ne rechigne jamais à l’idée d’amener un peu de changement.
Ce soir, je suis accompagné, en outre. Kenaï et Nadja, mes enfants aînés, n’ont pas pu faire le chemin jusqu’à Yggdrasil pour représenter leur génération, mais leur remplaçant était tout trouvé en la personne de Soren. Il est certes encore un peu jeune, mais il n’a pas grand chose à faire de plus qu’observer et saluer. Et puis… Je ne vais pas mentir, c’est aussi une bonne justification pour passer un peu plus de temps avec lui.
Rajustant le haut de mon veston, je jette un coup d’oeil à travers le balcon, guettant le moment où nos invités finiront par arriver. Sans surprise, la demeure qu’on m’a confié en tant qu’ambassadeur d’Altissia est démesurement grande pour rien ; elle m’angoisse un peu, d’ailleurs, comme le faisait le domaine familial quand j’étais plus jeune. Difficile toutefois de réunir autant de monde pour des festivités soporifiques et on ne peut plus scriptées autrement, toutefois. Mais bon, je suis plutôt doué pour faire la conversation et les cérémonies de présentation ne sont pas les pires ; parfois, on découvre de chouettes personnes. En tant que chef de famille, c’est aussi la manière la plus efficace que j’ai d’avoir une vision globale sur l’état de tout le monde.
Je jette un bref coup d’oeil vers une tête bleutée non loin de moi. Soren semble bien agité, et je ne retiens pas un petit sourire amusé en le regardant se préparer. Je prends la liberté de passer dans son dos discrètement.
« Ton pourpoint est mal boutonné, jeune homme. »
Bon, d’accord, je suis un peu vache, mais… Mais rien, vrai que je suis un peu pénible, des fois, comme père ; c’est juste très tentant, de l’enquiquiner.